Les critiques américaines étaient plus que moyennes, celles françaises étonnamment meilleures, la bande-annonce plutôt prometteuse : autant dire qu'il n'était pas évident de se faire un avis précis sur ce que l'on pouvait attendre de ce dernier volet d'une trilogie entamée il y a maintenant dix-huit ans, dont on a appris l'existence dans les toutes dernières minutes de « Split », dont on ignorait déjà qu'il était une « suite » d' « Incassable » (vous suivez toujours?). Et j'avoue qu'il n'est pas évident de se faire un avis précis sur « Glass », même si, avec le temps, je me rends compte que je l'ai quand même bien apprécié. D'abord, M. Night Shyamalan sait habilement exploiter l'univers des deux œuvres précédentes tout en prenant soin d'en créer une nouvelle, dotée d'une identité propre. La réalisation et la photographie sont à ce titre assez brillantes, certaines séquences
(notamment l'arrivée des trois héros dans cette étrange salle rose aussi belle qu'inquiétante)
nous restant en mémoire. C'est un rythme assez étrange, loin d'être trépidant sans être ennuyeux, donnant l'impression qu'il se passe à la fois peu et beaucoup de choses (ce qui est un peu le cas, d'ailleurs). Le récit se dynamise toutefois avec la présence de Samuel L. Jackson, apparaissant comme le « chaînon manquant » de la trilogie, son importance devenant capital dans le discours et le regard que peut avoir Shyamalan sur la question des super-héros, proposant quelque chose de tout aussi différent que ne pouvait l'être « Incassable » à sa sortie. Celui-ci garde une vraie intégrité artistique, confirmant sa proposition d'une autre voie pour le genre, offrant au passage quelques beaux rebondissements (son ADN) sans que cela soit gratuit. Je dois même avouer que ce choix de
faire mourir les trois hommes
, qui plus est de façon aussi abrupte, je trouve ça franchement culotté, surtout à une époque où les pontes de Marvel et DC prennent si peu de risques dans leurs productions... Dommage qu'autour de ce trio, il n'y ait pas grand-monde de réellement marquant, la troublante Anya Taylor-Joy étant vraiment reléguée au second plan, tandis que Charlayne Woodard paraît plus jeune que Jackson alors qu'elle est censée être sa mère : jamais idéal... Maintenant, si pour le coup le cinéaste s'éloigne presque trop des codes du genre, les réflexions posées, le talent du bonhomme (à quelques exceptions près) font de « Glass » une conclusion intrigante, originale et ne nous laissant clairement pas indifférent : à défaut de l'événement espéré, que M. Night Shyamalan ait pu se relever après plusieurs lourds échecs est une excellente nouvelle pour le septième art.