Il y a près de 20 ans, Ralph Fiennes découvre la biographie de Rudolph Noureev écrite par son amie Julie Kavanagh. Fasciné par la culture russe, l'acteur est particulièrement captivé par les débuts du danseur, de son enfance à Oufa à ses études de danse à Leningrad et sa décision de passer à l’Ouest en 1961. Il y voit un potentiel cinématographique, même s'il ne songe alors pas à mettre lui-même en scène son histoire : "ce qui m’intéressait, c’était la volonté de Noureev d’accomplir son destin et la cruauté des épreuves qu’il a surmontées, ou encore le contexte du fossé idéologique entre l’Est et l’Ouest au plus fort de la guerre froide".
Pour Noureev, Ralph Fiennes a contacté David Hare, scénariste nommé à l'Oscar pour The Hours et The Reader : "Il sait écrire des personnages audacieux et il s’intéresse aux histoires liées à un contexte politique et social marqué". Le scénariste, qui avait déjà fait des recherches par le passé sur le danseur, souhaitait s'intéresser à la période de sa vie située à Paris tandis que le réalisateur voulait se pencher sur son enfance et ses études à Saint-Pétersbourg. Les deux hommes se sont finalement mis d'accord pour adopter une structure ternaire qui enrichirait le récit.
Hare a pu s'entretenir avec deux personnes qui connaissaient bien Noureev : Clara Saint, qui lui a permis de passer à l'Ouest, et le danseur Pierre Lacotte.
À une époque où les danseurs n'étaient considérés que comme des faire-valoir de leurs partenaires féminines, Noureev comptait bien montrer qu'il n'était pas qu'une marionnette tout juste bonne à reproduire des chorégraphies. Le scénariste David Hare revient sur cet artiste frondeur : "Il voyait bien que la fonction du danseur de ballet classique était sans grand intérêt. Traditionnellement, l’homme prenait des poses héroïques tandis que la ballerine gravitait autour de lui et suscitait l’admiration. Avec Noureev, on assiste à une explosion des différenciations sexuelles. Car, à mes yeux, il était clairement bisexuel : sa danse reste masculine et héroïque, mais elle est beaucoup plus expressive, et moins statique que dans le ballet soviétique traditionnel ".
Pour Ralph Fiennes, il était primordial d’engager des acteurs et danseurs russes et de les faire dialoguer dans leur langue maternelle dans les scènes qui l’exigeaient. Le réalisateur a eu recours à deux directeurs de casting qui ont parcouru la Russie avant de lui proposer 4-5 candidats sérieux, dont Oleg Ivenko : "J’ai senti qu’il serait capable de jouer et, en plus, il ressemblait vraiment à Noureev. La suite m’a donné raison : dès les bouts d’essai, il comprenait immédiatement mes consignes". Il s'agit de la première expérience de comédien de ce danseur classique professionnel.
Il était très important pour Ralph Fiennes de tourner à Paris et Saint-Pétersbourg malgré les difficultés logistiques et le budget que cela représentait. L'équipe a pu filmer une semaine à Saint-Pétersbourg à la fin de l’été 2017 et investir notamment le Musée de l’Ermitage, qui a autorisé l'accès à une équipe de cinéma pour la première fois depuis L’Arche russe de Sokourov en 2002. Lors du tournage de six jours à Paris, l'équipe a pu investir le Louvre, la Sainte-Chapelle, le Palais Garnier et les quais de Seine.
Le reste des scènes a été filmé en studio en Serbie où la chef-décoratrice Anne Seibel a reconstitué l’école Vaganova de Leningrad, le Théâtre Mariinsky où se produit la troupe du Kirov et l’aéroport du Bourget.
Hayden Christensen fut envisagé dans le rôle de Noureev mais une blessure à la cheville l'empêcha d'assurer les scènes de danse.