Le Caravage était l'un des films de 2015 que j'avais raté en salle et qu'il me fallait absolument voir, j'adore vraiment le cinéma d'Alain Cavalier, sa façon de faire, de voir les choses, de filmer les petites choses pour présenter quelque chose ou quelqu'un. Ici ça commence de la même façon, on filme un cheval qui se fait préparer, mais il le film en gros plan, il faudra attendre quelques minutes avant de le voir, enfin, en entier. Et pourtant on le connaît déjà, on l'a vu sous tous les angles, à présent on peut juste apprécier le travail.
Parce que c'est de ça dont il s'agit, du travail, du travail de Bartabas (que je ne connaissais pas) écuyer, metteur en scène de spectacle équestres... Et on voit tout, parce que Cavalier a le temps, il a le temps de tout filmer, de montrer, de nous faire voir l'évolution, sans commentaires. On peut juste apprécier ce que l'on voit, un homme, son cheval.
Mine de rien, peut-être que Cavalier s'en défendrait, c'est très politique de filmer quelqu'un, qui a un savoir faire, exécuter son savoir faire. Ou tout simplement de voir quelqu'un qui prend le temps, qui est soigneux, qui se donne à fond dans ce qu'il fait, qui essaye de créer quelque chose.
Et forcément il y a cette relation entre l'homme et son cheval, cette relation qui amène à une certaine confiance réciproque et on sent en tant que spectateur qu'il se passe quelque chose, que ce n'est pas de la tricherie, qu'on est pas face à un acteur qui fait semblant d'aimer son cheval, mais bel et bien face à un type qui fait tout pour ses bêtes.
Ici Cavalier sait se taire, parce que ce que l'on voit n'a pas besoin de commentaires, ça n'a pas besoin d'explication, d'ailleurs ça parle très peu et lorsque ça parle, le son est si dégueulasse qu'on ne comprend pas grand chose. L'essentiel passe par l'image, passe par ce que l'on peut ressentir.
Et finalement ce film est la preuve, une fois de plus, que ce qui compte ce n'est pas le sujet traité, comment on le traite. Parce que moi je m'en fous d'un dresseur de chevaux, par contre voir un film qui montre ce que c'est que le travail, qui montre ce que c'est que de développer une relation avec un cheval, de le dresser, de parvenir à lui faire faire des choses que les autres chevaux ne savent pas faire, ou tout simplement de faire ressentir ce que c'est qu'un cheval, ben oui, c'est vraiment bien.
Parce que c'est la première fois au cinéma où je vois vraiment à quoi ressemble un cheval, où je vois à quel point c'est imposant, musclé. Et si bien sûr Cavalier avec sa petite caméra DV qui capture des moments pris sur le vif ne filme pas comme Le Caravage (le vrai) pouvait composer ses peintures, mais comme pour la conversion de Saint Paul on voit les reflets de lumière sur la bête mettant en valeur ses muscles et ses veines.
Et peut-être, malgré le fait que c'est un peu étrange d'appeler un film Le Caravage qui ne trait pas du peinture, mais du cheval, on peut malgré tout, refaire le lien comme ça... par la beauté du corps.