Le réalisateur Julien Hallard a eu l'idée de Comme des garçons en écoutant une émission de radio : "J’ai eu un coup de foudre pour cette histoire : en 1968, Pierre Geoffroy, un journaliste sportif de l’Union de Reims, a passé une petite annonce pour organiser un match de football féminin. Contre toute attente, l’équipe montée à cette occasion et lui-même allaient devenir les pionniers du renouveau du football féminin hexagonal. Il faut savoir qu’à cette époque, les filles ne jouaient pas au football. Ce n’était même pas interdit, ça ne se faisait pas, c’est tout. La Fédération Française de Football ne délivrait pas de licences féminines. Les filles de Reims ont donc mené le combat contre les préjugés avec détermination, talent, et pas mal d’humour. Quand j’ai commencé à écrire à leur sujet, on était en 2012. Non seulement, le football féminin commençait sa percée médiatique mais on assistait à un renouveau des questions autour du féminisme. Bref, il y avait un écho moderne dans cette histoire, un air du temps qui renvoyait à cette période de mutations de la fin des années soixante."
Pour écrire le scénario de Comme des garçons, Julien Hallard a collaboré avec Claude Le Pape (Les Combattants) et Fadette Drouard (Patients) : "Claude Le Pape qui a prouvé avec Les Combattants qu’elle avait un vrai talent pour créer des scènes et incarner des personnages, et Fadette Drouard, la co-scénariste de Patients dont j’aime la liberté de ton et l’énergie de l’écriture", précise le cinéaste.
Pour Comme des garçons, Julien Hallard revendique l'influence de cinéastes tels que les frères Coen ou Wes Anderson : "Ils construisent des univers forts, travaillés. Leur mise en scène est brillante, il y a de la maîtrise sans en faire trop. J’aime aussi beaucoup le ton de ces films, avec des acteurs qui n’hésitent pas à forcer les traits de leurs personnages. Plus généralement, je pense appartenir à une génération dont la cinéphilie est assez hétéroclite, sans chapelle. J’ai grandi avec les films de Steven Spielberg et les comédies de Francis Veber puis plus tard, je me suis pris de passion pour le Godard du début de la Nouvelle Vague, celui de Pierrot le fou. Ces différentes strates ne sont pas incompatibles, au contraire, et elles concourent toutes à vous donner un certain style."
Outre les personnages principaux campés par Max Boublil et Vanessa Guide, Julien Hallard a rassemblé de jeunes étoiles montante du cinéma français pour incarner ses joueuses comme Solène Rigot ou Sarah Suco : "J’ai commencé à penser à des comédiennes de façon individuelle avant d’envisager l’équipe car j’avais besoin d’actrices techniques, dotées d’une vraie puissance de jeu, qui soient capables d’exister rapidement à l’écran dans des scènes de groupe. Leurs personnages avaient beau être des archétypes, elles devaient faire preuve de subtilité et de finesse pour ne pas en faire des caricatures. Après, il fallait les rassembler et favoriser l’alchimie. Ma chance a été l’entrainement footballistique : en se préparant ensemble, deux fois par semaine pendant plusieurs mois, elles ont créé des liens. En arrivant sur le plateau, je savais qu’elles étaient engagées, complices et motivées. L’équipe existait déjà."
Max Boublil revient sur sa prépation pour le rôle de Paul Coutard, un personnage à l'opposé de sa personnalité : "Julien Hallard m’a vraiment fait bosser ! J’étais ravi car c’était la première fois qu’un réalisateur me proposait de me glisser dans les chaussures d’un autre. Il m’a demandé de perdre cet air « je-m’en-foutiste » qui me caractérise et de jouer davantage les minets soucieux de leur style. J’ai aussi travaillé ma dégaine et ma diction pour être en accord avec l’époque. C’était une gymnastique à acquérir pour un garçon comme moi qui parle verlan et vit en permanence dans des vêtements dépareillés et confortables. Enfiler un jean slim, boutonner une chemise ou lacer des chaussures était déjà un sport ! La seule chose qui m’évoquait des souvenirs chez Paul était le brushing car je m’en suis fait pendant toute mon adolescence."
Dès le départ, Julien Hallard voulait avoir « Comme un garçon » de Sylvie Vartan car c’est une madeleine de Proust. "Ça installe l’époque avec un côté pop acidulé et une ambiance nonchalante qui me plaisaient beaucoup", confie le réalisateur. Pour le générique de fin, « Respect » d’Aretha Franklin s’est imposé de lui-même tant c’est un hymne féministe qui va avec l’énergie de l'équipe de filles. "Étant fan de rock, je me suis aussi fait plaisir en parsemant le film de petites perles comme le « Just Like me » des mythiques The Hollies. En ce qui concerne la bande originale, je voulais des mélodies fortes, des thèmes reconnaissables pour les personnages principaux ; ce qui est à l’opposé de la tendance actuelle dans le cinéma qui va vers de la musique d’accompagnement et d’atmosphère. J’ai donc tout naturellement pensé à Vladimir Cosma qui a justement cette capacité mélodique hors norme. C’est un grand compositeur avec une forte personnalité qui prend des risques et qui imprime son style sur le film. Pour paraphraser Stravinsky, je dirais que quand d’autres font de la musique « papier peint », Cosma lui fait des tableaux. Et quels tableaux !", affirme le metteur en scène.
Julien Hallard revendique la portée féministe de son film. Un féminisme qu'il qualifie de "pratique" : "Leur lutte visait un but précis : celui de jouer au foot. Ces femmes n’étaient en rien des Simone de Beauvoir, des Elisabeth Badinter, ou des membres du MLF : elles étaient factrices, fille d’agriculteurs ou femme au foyer ; elles disent n’avoir pas eu de réelle conscience politique ; seule l’envie de jouer à ce sport réservé à l’époque aux seuls hommes leur ont donné l’envie de changer l’ordre des choses établi. Et si elles ont finalement fait le même cheminement que celui des intellectuels en 1968 pour l’égalité entre les hommes et les femmes, c’était sans volonté de revendication politique de leur part. Il y a là une ironie qui évite de tomber dans la simple démonstration d’intentions et renforce au final la portée du message du film."