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Daniel C.
150 abonnés
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4,0
Publiée le 7 novembre 2016
Alors, d'abord, il y a la beauté de Jean-Pierre Léaud. Parfois dans un regard, on capte l'œil malicieux du jeune Antoine Doinel des quatre cents coups. Et c'est sublime de voir ce roi autrefois si lumineux, s'assombrir et ne pas finir d'agoniser. Le film d'Albert Serra pourrait être qualifié, selon moi, de film pictural : en effet nombre de prises de vues donnent lieu à de véritables scènes de tableaux. Louis XIV est entouré de façon quasi continue, essentiellement par des hommes. Souvent il n'esquisse qu'un râle de douleur, puis, subitement, il a une demande ou une question fort précises, qui réclament leur exécution immédiate. Chacun obtempère aux injonctions royales. Jean-Pierre Léaud est sublime dans son immobilité. En tant que spectateurs, on est peu à peu fasciné par cette mort annoncée et que l'on attend et qui ne vient pas. On oscille entre espoirs de guérison et moments où l'on espère capter le dernier instant de vie dans le regard du roi. La mort devient l'objet central que l'on suit pas à pas. Le rythme est lent. C'était pour le moins audacieux d'entreprendre une telle expérience historique. Je ne connaissais pas ce jeune réalisateur catalan de 41 ans, qui apporte une nouvelle manière de faire du cinéma.
Tragi-comédie La prouesse de ce film est d’avoir traité le drame de la mort sur un mode à la fois contemplatif (certains trouveront le temps très long) et résolument comique, ce qui en fait au sens propre une tragi-comédie. Les images sont splendides, essentiellement des plans extrêmement rapprochés. Tableau après tableau, portrait après portrait éclairés à la Rembrandt, révèlent tous les sentiments humains : l’orgueil, la peine, l’espoir, le désespoir, la fatuité, la bêtise. Le son est remarquable, presque pas de musique mais quand elle arrive, elle arrive à point, grandiose. Jean-Pierre Léaud exprime à la fois la grandeur et la vanité de sa fonction de manière époustouflante et sobre à la fois. Le film est constamment sur le fil du paradoxe, et c’est sa grande originalité. Il ne joue pas sur les émotions mais sur l’observation de la tragédie humaine.
C'est un peu plus qu'un film, c'est une cérémonie funèbre. Albert Serra réalise le plus inattendu des paradoxes en liant le roi Louis XIV non pas au divin ou au céleste mais au corporel. Car le roi se meurt pendant près de deux heures, agonise d'une gangrène que les courtisans ont refusé d'admettre, conserve une autorité écrasante sur ces derniers qui ne le lui laissent pourtant aucun répit. D'un point de vue purement spatial, le roi n'est jamais seul; sa solitude est intérieure et personne ne peut y remédier. Ce que montre parfaitement Serra, c'est le rapport hyper respectueux entre le monarque et ceux qui l'accompagnent et en quoi ce lien - totalement conventionnel - rend impossible tout remède, qu'il soit moral ou physique : dans les vingt dernières minutes, alors que le roi a perdu sa jambe depuis longtemps et que le mal s'est imprégné dans le corps entier, ses fidèles s'acharnent en vain (par obligation) pour tenter de le sauver. Si l'expérience proposée par Serra est parfois difficile car exigeante, elle n'est jamais ennuyeuse car, d'une part, il y a toujours du mouvement dans le cadre, dont la sublime composition picturale permet de s'attarder sur une multiplicité de détails visuels et sonores et, d'autre part, le cinéaste intègre malicieusement un humour pince-sans-rire qui désamorce quelque peu le sérieux de l’événement. Majestueux et passionnant, "La Mort de Louis XIV" n'est pas le film conceptuel soporifique auquel on aurait pu s'attendre mais un geste grand et ambitieux, à la hauteur de l'acteur qui incarne le Roi Soleil, Jean-Pierre Léaud magnifique dans sa capacité à jouer aussi bien la fragilité que la ténacité.
Un film ambitieux où la beauté des compositions picturales crée l'atmosphère mortuaire recherchée. Dans le rôle du monarque, Léaud est phénoménal, tout en haussement de cils et en murmures étouffés.
Une œuvre baroque crépusculaire de toute beauté. La lente agonie - "peinte" en clair/obscur - du Roi Soleil est aussi angoissante que fascinante ... c'est un film radical donc impossible à conseiller !
Filmé tourné exclusivement en intérieur (sauf peut-être la 1ère scène), en plans serrés, quasiment sans dialogue, ce film intimiste se penche résolument sur le for intérieur. Pas de mots pour exprimer la lente descente vers la mort de ce roi prestigieux qui garde jusqu'au bout, au moins dans ce film, sa noblesse, sa prestance, sa classe. Jean-Pierre Léaud semble parfait dans ce rôle d'expression de l'intériorisation des sentiments, tout en stoïcité malgré la connaissance d'une fin inéluctable. Et comment ne pas souligner la qualité picturale du film où les gros plans et les clairs-obscurs nous emportent dans la peinture de Georges de La Tour où celle de Rembrandt : les visages sont burinés, marqués, expressifs et les couleurs sont chaudes, rouge carmin, ocre, pourpre...
Et bien c'est pas mal du tout. Certes faut un peu aimer l'Histoire de France pour y trouver son compte. J'ai beaucoup aimé, j'ai eu l'impression de suivre la fin du grand roi. L'acteur qui joue Louis XIV est effectivement très très bon.
Serra est une des révélations les plus éclatantes du cinéma européen de ces dernières années, chacun de ses films proposant une expérience formelle inédite, comparable à ce qu'avait tenté Kubrick avec 2001l'Odyssée de l'espace. Ici, nous assistons à la lente agonie de Louis XIV, et on reste à son chevet jusqu'à son dernier souffle. La caméra enregistre des plans longs ou Jean-Pierre Léaud gémit de douleur, mais parfois ne dit rien, son regard fixant l'objectif, et son corps immobile devient une peinture vivante. Si on quitte le roi, quelques instants, c'est pour assister à l'échange entre ses médecins qui se demandent comment sauver sa vie. Ils n'y peuvent rien, ils le savent, aucun humain ne pouvant s'opposer à la mort d'un roi. Le sujet du film c'est le corps du roi, être déifié en train de quitter lentement l'ici bas, qui tel le corps du Christ se sanctifie dans la mort. Le film commence sur une image de crépuscule lorsque le roi soleil rentre de promenade, et la suite du film est la lente extinction de sa lumière. L'agonie est le seul moment où le roi, être désincarné par essence, est réduit à l'état de corps, se laisse toucher par les soignants, jusqu'à l'exploration de ses entrailles après le trépas. Le film est l'histoire d'une réduction divine à l'état d'être humain, puis de charogne, c'est une exploration de l'essence humaine, autant qu'une réflexion sur la nature du pouvoir. Un film universel et proprement sublime.
Une superbe mise en image de l'agonie du roi Soleil, un Jean-Pierre Léaud juste et touchant. Une période particulière et à laquelle le film rend bien hommage en faisant écho à l'éexposition "Le roi est mort" qui était à Versailles fin 2016 début 2017. Un film à découvrir sur un monarque qui recèle toujours de plein d'informations à donner tant sa vie fût longue et riche.
Excellent film de l'enfant terrible du cinema catalan. Photo exceptionnelle, interprétation de Jean-Pierre Léaud très convaincante. L'agonie du roi où aucun membre de son entourage révérencieux ne veut accepter l'amputation suite à la gangrène de la jambe. Moments drôles aussi au moment de l'autopsie.
Dés la première scène, Albert Serra nous convie en compagnie de Louis XIV (Jean-Pierre Léaud) à contempler une ultime fois la beauté de la nature et des jardins resplendissants du château de Versailles. C'est la dernière fois que les arbres et la sérénité de la verdure atteindrons les yeux du spectateur et ceux du Roi Soleil. Par la suite et tout au long de cette véritable expérience, *La Mort de Louis XIV* va nous enfermer entre les 4 murs de la chambre magnifique, mais asphyxiante, de Louis XIV. Une chambre où la mort est venu le chercher.
Le temps s'écoule et se savoure au rythme des derniers jours de souffrance de Louis XIV. Les dernières sources lumineuses se puisent sur les bougies éclairants le visage ridé et fatigué du roi Français, et sur les sons des cornes et tambours de chasse que l'on entend vaguement à travers une petite fenêtre. Les proches, les médecins et les religieux se succèdent dans une danse macabre, autour d'un grand lit mortifère, où séjourne un Louis XIV accablé par la fatigue et la souffrance de la gangrène qui le ronge peu à peu.
Albert Serra ne laisse pas de place au sentimentalisme et autres déclarations pâteuse qui rendraient n'importe quelle récit amer. Seuls les visages neutres mais accablés par la vie et sa fin tragique, demeurent maîtres de se ressenti angoissant face à la mort. Comme je le disais plus-haut, *La Mort de Louis XIV* est une véritable expérience. Albert Serra filme la mort en direct, au rythme des derniers mots du Roi Soleil.
Le rythme contemplatif dans la lignée d'une lente chute vers la mort, est servi grâce à une mise en scène magnifiquement impressionnante. A l'image d'un *Barry Lyndon* de Stanley Kubrick, les quelques bougies présentes dans la pièce font office d'éclairage et de raison valable pour ne pas encore tomber dans le sombre mortifère. Chaque plan est une véritable toile digne des œuvres de Raphael. Mais en face de nous, ce n'est pas un ''intouchable'' roi protégé par la grâce et le pouvoir. C'est un simple humain qui tente de se dresser pour une dernière fois face à un spectateur qui ne peut ignorer les souffrances naturelles de l'homme face à la maladie. Une époque aussi où la médecine peine à être efficace et à travers laquelle les médecins de la faculté ne peuvent que s'inspirer pour améliorer la discipline.
Mais Albert Serra le sait bien : il ne s'agit pas seulement ici de filmer la fin de Louis XIV - On parle aussi de la fin d'une ère et d'une légende, Jean-Pierre Léaud. **Dans *La Mort de Louis XIV*, Jean-Pierre Léaud est Louis XIV !** L'acteur est monumental (injustement non-récompensé) et signe une performance dont le profond aspect aspire inévitablement à saluer une dernière fois un immense acteur qui pourras difficilement briller de nos jours.
*La Mort de Louis XIV* ne peut laisser indifférent. Cette véritable grande toile signé Albert Serra nous plonge au coté d'un Louis XIV sur le chemin de la mort.
Si le sujet est sordide et très ciblé, il est impressionnant de constater ce qu'en a fait Albert Serra. Il y a d'abord la prestation d'acteur, évidemment. Mais c'est surtout dans ce que le film montre par les réactions de l'entourage et le jeu de Jean-Pierre Léaud, qui arrive à rendre une telle tristesse qu'on la croirait vrai, que réside bien sûr le véritable intérêt. Louis XIV qui n'est plus qu'une épave, tellement respecté qu'on voit bien dans le film ce qu'il fut, et qui rayonne d'un tel magnétisme que jamais le respect ne faiblit. La tristesse et la solitude d'un homme que les médecins semblent avoir pris comme sujet vivant d'expérience, témoin le mot de la fin, qui fait par ailleurs penser à celui de Que la fête commence de Tavernier. Le film n'est certes pas léger et divertissant, mais c'est une réelle réussite.
Un film assez pétrifiant de sobriété et de beauté, sur ce qu'est l'image mortifère d'une figure déchue, celle de Louis XIV mourant à petit feu d'une gangrène, Albert Serra filme J-P Léaud sous tous les angles sans que ce dernier n'est limite à faire quoi que ce soit, si ce n'est être ce vieil homme affaiblit alité au milieu de ses sujets. On reste toujours dans cet espace confiné, comme prisonnier d'un tableau aux teints tamisés avec ces portraits figés dignes de Rembrandt, c'est subjuguant. Ce film est un pur objet de mise en scène du début à la fin, avec un rythme soulignant la progression de la douleur, la lenteur de l'agonie, les plans savent prendre le temps et délivrer une sensation authentique, comme si nous étions privilégiés d'être au chevet de ce roi qui meurt, tout en étant témoins de l'impuissance du petit monde qui s'affaire pour apaiser ses souffrances et découvrir le mal qui le ronge. J'ai vraiment aimé cette manière de montrer la fin de vie d'un homme de pouvoir, qu'aucun n'est immortel pour même en devenir presque pathétique, Serra conserve mordicus cette stature d'être supérieur, préservant sa dignité pour le faire boire dans un verre en cristal. Tout y est subtil et jamais dans une logique documentaliste comme dans Le Promeneur du Champ-de-Mars (qui relatait les derniers jours de François Mitterrand) par exemple, ce n'est pas l'intérêt de savoir le pourquoi du comment, d'ailleurs la fin du film sonnera comme un aveu car l'origine de la gangrène n'est même pas dévoilée. Le silence a une place considérable avec simplement une musique venant couper l'aspect diégétique pour mettre en valeur la grâce du masque mortuaire de Léaud, très bien placée d'ailleurs, sans doute un des plans les plus symptomatiques de l'intention du réalisateur. Très beau film.
La très grande force de La Mort de Louis XIV, et c’est là son principal intérêt, réside dans la peinture d’une agonie royale qui rappelle que même la mort du roi n’échappe pas aux cérémonials. Albert Serra compose une œuvre volontairement figée, engluée dans des postures qui, par contrecoup, révèlent les dernières lueurs d’un soleil vacillant, un soleil qui peine à manger, demande à boire, souffre d’une gangrène de la jambe que l’on soigne en appliquant des onguents. C’est parce que tout est pris d’immobilisme que les mouvements infimes du corps terrestre du roi nous sont accessibles, mieux visibles et intelligibles. Le prince est entouré de perruques poudrées qui divulguent mal des visages blafards et maladifs ; à son côté droit, un tableau, un portrait de lui plus jeune, icône cristallisant l’image mythique du roi tout en fonctionnant comme une vanité, la preuve que la peinture immortalise une beauté coupée de sa réalité physique, elle condamnée à la dégradation. Car la médecine, représentée ici par le personnage de Fagon, docteur de la Faculté de Paris, apparaît comme une science imparfaite : « Monsieur, nous ferons mieux la prochaine fois », assure-t-il au roi après son départ. Albert Serra nuance donc les représentations traditionnelles de la figure du médecin : il refuse de l’aborder par le biais du regard comique défendu par le théâtre de Molière notamment, préfère travailler la complexité de son rôle comme La Bruyère la révélait dans la remarque 68 de la section « De Quelques Usages » de ses Caractères. Le médecin véritable – par opposition au charlatan – est celui qui a conscience des limites de sa science mais qui croit en son perfectionnement. La Mort de Louis XIV met par conséquent en scène deux impuissances : le roi en tant que corps physique impuissant à ne faire qu’un avec le corps mystique, le médecin incapable de sauver son prince parce qu’on ne guérit pas la mort, sinon en se confrontant à la volonté de Dieu. Sublimé par la mise en scène d’Albert Serra qui pense chacun de ses plans comme un tableau, travaille la lumière de façon à plonger ses espaces dans une pénombre préfigurant le crépuscule du monarque. Une œuvre magistrale, mais un peu trop longue par moments, sans que ces longueurs ne participent à l’agonie en tant que spectacle de la douleur. Jean-Pierre Léaud est bouleversant.
Je n'ai pas décroché tout du long de ce film historique , on souffre avec le roi . La palme d'or est largement méritée pour son rôle , qui n'est pas aisé . Magistral jusque dans la mort ....