Quand j’ai vu ce « Cure for Life » sortir, je me suis soudainement étonné d’une chose : d’un côté, j’ai constaté que je n’avais jamais pleinement été emballé par un film de Gore Verbinski, mais d’un autre côté, je me suis rendu compte que je ne pouvais m’empêcher d’apprécier malgré tout son cinéma. D’ailleurs c’est un petit peu ce que je retire comme bilan de ce « Cure for Life » : au final, dans ce film, j’ai continué d’apprécier le cinéma de Verbinski tout en rejetant presque intégralement son film… Alors OK… J’entends : vous voilà bien avancé vous dites-vous ! Bah oui, c’est vrai et je le sais : c’est quand même bizarre comme propos ! Mais bon, rassurez-vous, je vais creuser un petit peu ce que j’entends par là. Déjà, je vais commencer en précisant tout de suite ce que j’apprécie tout particulièrement dans le cinéma de Verbinski et qui se retrouve dans ce « Cure for Life ». Ce que j’apprécie beaucoup, c’est sa plastique. Mais par tous les dieux que ce film est beau ! Au niveau de la pertinence des plans, des travelings, du montage, de la photo (toujours sublime dans les films de Verbinski), je trouve que tout marche. Même au niveau de la mise en place de l’ambiance, je trouve que ça marche aussi… Pourtant, il n’empêche qu’au final, ce film, sur moi, il ne marche pas. Bah oui, mais c’est comme ça que voulez-vous… Du début jusqu’à la fin, j’ai soupiré. A aucun moment je ne me suis vraiment impliqué dans cet univers… Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce que je pense que Gore Verbinski, comme beaucoup d’autres formalistes talentueux malheureusement, n’a finalement pas grand-chose à dire dans ses films. Et bon, avouons-le, dans un art du narratif comme peut l’être le cinéma, c’est tout de même un peu gênant… Bah oui, c’est tout bête, mais c’est un peu la base. Si tu n’as pas de propos, même formel, eh bah ton film il n’a pas d’âme. Il tombe à plat. D’ailleurs, moi c’est ce qui m’a choqué dans ce « Cure for Life ». A aucun moment je n’ai vu d’intérêt à l’histoire. Pire, je l’ai trouvé prévisible de bout en bout. Toutes ses révélations finales sont déjà connues dès le lancement de l’intrigue tant elles sont prévisibles et – osons le dire – clichées au possible. Du coup, il devient vite triste de constater à quel point tous ces jolis artifices sont au final mis en œuvre au service d’un long-métrage si lisse et si creux… J’aurais aimé m’en contenter, mais clairement le film ne me l’a pas permis sur la durée. Bah oui, mais c’est l’autre problème quand on brode sur du rien, à la longue ça se voit, et donc du coup, on en arrive à remplir avec ce qu’on peut, et comme souvent dans ce genre de situation, c’est rarement avec le meilleur. Le final pour moi est notamment un très bon exemple de dérapage non contrôlé. Alors qu’il avait su tenir le fil d’une atmosphère oppressive du petit thriller horrifique à l’ancienne, sur la fin, Verbinski cède un peu à la surenchère ridicule, offrant dans ce film des scènes qui gâchent définitivement le peu qui avait été entrepris (Par exemple,
le coup de la machine qui fait avaler des bestioles, j’ai trouvé ça too much et vraiment gratuit. Même chose quand le baron décide de s’arracher son visage, comme ça, pour le fun, à la toute fin.
) Et le pire dans tout ça, c’est qu’en fin de compte, le peu de scénario qui a été posé au court de ce film n’est même respecté sur le long terme ! Pour moi ça reste quand même le symbole ultime d’un film qui n’est pas mené comme il faut. Parce qu’il y en a des trucs qui ne tiennent pas la route ou qui restent sans réponse au final ! Et voici un petit florilège pour ceux qui en douteraient :
la substance dans l’eau que Dane DeHaan retrouve au bout de son doigt, c’est quoi finalement ? Et puis c’est quoi exactement le pouvoir de cette eau qui déshydrate ? Et puis pourquoi le dentiste s’est décidé de percer la dent de Dane DeHaan, comme ça, gratuitement ? Et pourquoi à la fin Dane DeHaan récupère toutes ses dents alors que tous les autres les perdent ? Pourquoi Dane DeHaan est à un moment zombifié en mode « moi-non-plus-je-veux-plus-partir » et pourquoi juste après il repasse en mode rebelle ? D’ailleurs, pourquoi en général les gros richards qui viennent se faire traiter ici décident de rester quoi qu’il en coûte ?
Et je n’ose même pas parler de la morale finale qui dit que, en gros,
si aujourd’hui le baron arrive à ce point à exploiter les gens c’est parce que la société moderne s’est détournée de Dieu et qu’il est donc plus facile aujourd’hui d’exploiter les gens grâce à leur propre ambition
. Dans d’autres films, j’aurais sûrement taillé comme pas possible ce bon vieux relent réactionnaire bien fumeux, mais là, je n’ai même pas envie de le faire. J’ai tellement l’impression qu’ici, Verbinski n’en pense pas un mot ! Oh non ! Moi ce que je vois là-dedans, c’est juste l’ami Gore allé chercher une ficelle narrative caricaturale parmi tant d’autres dans sa boîte à clichés. C’est triste à dire mais je pense que ce gars là en à strictement rien à faire des histoires et des propos qui structurent ses films. Pour lui, tout ce qui compte, c’est l’atmosphère, c’est le rendu plastique du film. Il n’attend pas que le cinéma fasse voyager son esprit. Il attend juste qu’il fasse voyager les sens. Ainsi, brode-t-il toujours des histoires très stéréotypées pour que l’esprit n’ait pas à se préoccuper d’un quelconque effort de compréhension. Je peux encore comprendre le trip, mais une chose est sûr ce n’est pas le mien. Du moins, ce n’est pas le mien quand il s’agit de raconter n’importe quoi… Il n’en reste pas moins que des fois, sur un « Pirate des Caraïbes » ou un « Lone Ranger », Verbinski parvient à faire des films sympas, sans « prise de tête », c’est vrai. Mais là, pour ce « Cure of Life », je suis désolé, mais je trouve que son film est plus « vain » voire « ridicule » que véritablement « sans prise de tête. » Donc tant pis pour moi j’ai envie de dire. Avec « Cure for Life », ce ne fut pas pour cette fois-là… Peut-être ce sera pour la prochaine…