Emmanuel Finkiel a eu l'idée de faire ce film lorsqu'un de ses amis, Ahmed, avait dispuru de la circulation pendant 6 mois parce que, comme dans le film, quelqu'un s'était fait agresser dans sa cité et le nom "Ahmed" avait été prononcé à ce moment. La police a ensuite arrêté tous les Ahmed de la cité et la victime s'est obstinée à reconnaitre l'ami du réalisateur, alors même que l’enquête le mettait peu à peu hors de cause.
Pour donner corps au scénario, Emmanuel Finkiel s'est également posé des questions sur la victime de l'agression et les raisons qui l'on poussée à s'acharner contre Ahmed : "Qui pouvait-il être ? Quel était in fine son intérêt ? Je n’arrêtais pas d’interroger mon copain injustement accusé : « À quoi ressemblait-il ? Comment était-il ? ». Mais Ahmed n’était pas très loquace : « C’était une espèce de bolos qui n’osait pas me regarder, un pauvre type, un petit çais-fran », me répondait-il. C’est là, à partir de l’énigme que représentait pour moi ce « pauvre type », que peu à peu s’est esquissé le désir de faire ce film, un pauvre type que j’ai appelé Eddie et qui est devenu non seulement le personnage principal, mais celui à travers lequel tout serait vécu."
Via le personnage de Nicolas Duvauchelle qui ne s'aime pas, Je ne suis pas un salaud traite, comme tous les films réalisés par Emmanuel Finkiel, de l’identité et du rapport à l’autre : "Eddie subit, comme nous tous, à une échelle plus ou moins variable, cette pression sociale et sociétale qui nous enjoint d’être une belle personne, un bon père, un bon mari, un type respectable. Mais en même temps, comme nous tous, il est également animé par ses forces intérieures. Chez lui, ce ne sont malheureusement pas des forces positives. Quand il se voit comme un nul, il fait tout pour l’être. Aussi quand il essaie de bien faire, fait-il tout « foirer »."
Le mécanisme qui pousse Eddie à injustement dénoncer Ahmed s'apparente pour Emmanuel Finkiel à celui qui pousse le personnage principal du livre L'Etranger à planter son couteau dans le corps de l’"Arabe" qui est en face de lui : ce n'est pas à cause de l'altercation mais du fait de facteurs anodins du présent comme la chaleur, le bruit, le reflet du soleil sur la lame... C'est via ce même processus, à savoir les minuscules évènements qui ont lieu durant la parade d’identification, que Eddy s'apprête à commettre l'irréparable et s'enliser dans son mensonge.
Comme à son habitude, Emmanuel Finkiel a tourné en équipe réduite sur une courte période. Il a aussi fait le choix du numérique ce qui a facilité les choses puisqu'il a ainsi été possible de s’affranchir de la lumière sans jamais renoncer à une image travaillée.
En dehors de Nicolas Duvauchelle, Mélanie Thierry et Driss Ramdi, la plupart des acteurs sont des non professionnels appartenant aux mondes filmés : du personnel hospitalier dans les scènes d’hôpital, des magistrats pour le Palais de Justice, etc. Cela dans le but d'accentuer le côté authentique du film.
Si le personnage campé par Nicolas Duvauchelle commet un acte condamnable et n'est pas aimable, Emmanuel Finkiel a voulu le filmer sans condescendance et de telle sorte à ce que l'on ressente sa souffrance et sa colère envers la société.
Je ne suis pas un salaud est un projet que Emmanuel Finkiel porte depuis 2000 qui a été abandonné avant d'être repris plus tard lorsque le metteur en scène en a senti le besoin en fonction de l’état de la société et de son ressenti. Après sa rencontre avec la productrice Christine Gozlan, le projet s'est étalé sur quatre ans du fait de sa thématique et son personnage central peu vendeurs.
Je ne suis pas un salaud a été auréolé de plusieurs récompenses dont : Meilleur acteur et Meilleure mise en scène (Festival Francophone d’Angoulême 2015), le Prix Arte international (Atelier de la Cinéfondation - Festival de Cannes), le prix du jury jeune (Festival International de Pau) et le Prix spécial au Festival du Film France-Odéon de Florence.