L'Inde est divisée, entre les riches, qui le sont beaucoup, et les pauvres, qui vivent loin des palaces des premiers. Jay, né d'un père anglais, a terminé ses études et retourne dans son pays pour reprendre, si possible, la direction des hôtels de son paternel. Il a fait à Londres de brillantes études, et ici, en Inde, tout lui est dû. Il est cependant touché par la simplicité de Trishna, une jeune fille pauvre qui aide son père au champs et est attachée à sa famille et ses 7 ou 8 frères et sœurs. Jay engage Trishna pour travailler à son hôtel, et lui permet ainsi d'entretenir sa famille, alors que son père, blessé, ne peut plus travailler. Reconnaissante, la jeune fille tombe, lentement, et de loin, elle aussi sous le charme de Jay.
Est-ce donc une histoire d'amour? Le dernier film de Michael Winterbottom va au-delà de la simple romance, et dresse le portrait d'une certaine Inde, traditionnelle, attachée à ses valeurs familiales. Ces valeurs, Michael Winterbottom oublie cependant de les critiquer. La vie de Trishna, malgré les difficultés, apparaît quasiment idyllique. Sa famille, nombreuse, et pauvre, partage la même couche, se lève tôt et ne mange pas beaucoup. Mais elle est unie, les enfants vont, quand c'est possible, à l'école et rapportent des bonnes notes, et le père, s'il regarde d'un mauvais œil sa fille sortir le soir, ne lui fait que de bougons reproches, tandis qu'elle rentre avant 21h. Lorsque Trishna part loin du de sa famille, à Jaipur, capitale du Rajasthan, elle reste pure, apprend de tout, conserve son humilité et ne partage pas les rêves des autres filles qu'elle rencontre. Même son attirance pour Jay est pudique, et toujours platonique. L'étape suivante serait pour elle logiquement le mariage, avant de consommer ses désirs.
Quand elle part à Bombay avec Jay, elle aurait pu se rendre compte de sa soumission à sa famille, aux traditions, en découvrant un monde nouveau et libre autour d'elle. Là, les filles s'autorisent le sexe avec qui elles le souhaitent et pour leur plaisir; elles veulent travailler, danser et jouir. Trishna, sans tomber dans l'extrême décadence, ce n'est pas ce que je lui demande, n'intègre rien de cette liberté. Elle reste attachée à son éducation, soumise à celui qui n'est même pas son mari, ne sort pas sans lui et compte aussi sur ses revenus. Michael Winterbottom présente quasiment la rude éducation du Rajasthan comme celle qui est la bonne, au contraire de la dégradante vie des filles de Bombay. Trishna subit, accepte, et je déteste les personnages qui courbent l'échine. Son attitude ne fait jamais s'inverser les rôles, et l'intrigue se déroule dans le même morne déroulement que son chemin tout tracé par d'autres qu'elle.
Un personnage peu charismatique, zéro revendication de réalisateur, il ne reste que quelques jolies images, probablement fausses, d'une Inde de palaces et de jeunesse dorée. Même la pauvreté y semble belle, emplie d'amour et colorée par les robes des femmes. Certains paysages sont cependant superbes, mais à tout prendre, j'aime autant regarder un documentaire sur Arte plutôt que de suivre cette histoire d'amour sans intérêt.