"And who made them ?"
Si beaucoup de choses changent, il est une constante dans la série de films Alien, c'est la coexistence entre une élite (militaire, pénitencière, scientifique) et un groupe de socialement défavorisé voire carrément marginal (mécanos, soldats dépenaillés, criminels, contrebandiers) et Prometheus n'échappe pas à la règle qui voit se côtoyer des militaires et des scientifiques avec des mercenaires.
Ce qui change, c'est la dimension quasi religieuse prise par Ridley Scott et ses coscénaristes, Damon Lindelof et Jon Spaihts. Là où les histoires précédentes se contentaient d'un vague discours sur les dangers des manipulations à des fins militaro-commerciales, sur fond de huis clos horrifique, Prometheus fait la part belle aux envolées lyriques et pseudo-scientifiques (franchement convenues) de la création des humains par des extraterrestres sur fond de grands espaces. Ridley Scott a pris 33 ans et a perdu le talent qui était le sien de magnifier une ambiance avec un budget limité : cette préquelle a ainsi coûté plus de 10 fois plus cher.
Le casting en est peut-être la cause, présentant des acteurices déjà réputé·es quand son premier opus se contentait d'interprètes confirmé·es uniquement dans des cercles de connaisseurses pour donner la réplique à une Sigourney Weaver débutante. La technologie en est assurément une autre et c'est un point qui m'a dérangé : cette histoire censée se dérouler 200 ans avant le premier Alien montre une technologie autrement plus évoluée, ce qui n'a pas trop de sens.
Une esthétique faible compte tenu de ce Scott a déjà pu nous montrer, un scénario basé sur une légende à la limite de théories farfelues quand elles ne sont pas complotistes, ça fait déjà deux freins à mon enthousiasme, le second étant de loin le plus rebutant tant les incohérences sont rédhibitoires et génèrent des rebondissements prévisibles.
Reste cependant ce souci d'éviter toute forme de manichéisme chez Scott et je dois le lui laisser : gentils et méchants ne le sont jamais qu'en fonction des circonstances, une forme d'existentialisme qui lui est propre et qui serait à explorer par qui souhaiterait en rédiger une thèse : les rapports entre l'humain et le robotique sont explorés à plusieurs reprises dans son oeuvre et il s'y trouve aussi ce souci de présenter des personnages qu'on jugerait a priori négativement sous des dehors neutres, voire même parfois bienveillants. S'il n'appartient pas au Nouvel Hollywwod, Scott propose ainsi une lecture psychologique, même si plus superficielle, proche de celle d'un Scorsese ou d'un Coppola.
Enfin, je doir reconnaître que l'influence de H.R. Giger, véritable papa d'Alien, est prégnante, rendant hommage au génie du plasticien suisse et, plus généralement, à l'univers de la BD des années '70/'80, et que l'interprétation est assez juste. Prometheus n'est donc visuellement pas complètement raté mais souffre d'un scénario indigent qui le classe comme le moins bon film de la saga des xénomorphes.