Caos calmo a été présenté en 2008 au festival de Berlin, en compétition.
Caos calmo est l'adaptation du roman homonyme de Sandro Veronesi, lauréat du Prix Strega (équivalent du Goncourt) et best seller en Italie. Paru en France en 2008, le livre a reçu le Prix fémina étranger, quelques semaines avant la sortie du film dans l'hexagone. C'est le cinquième roman de Veronesi, auteur né en 1959 en Toscane et titulaire d'un diplome d'architecte. En dehors de son activité d'écrivain (on lui doit également des essais), il a créé une maison d'édition (Fandango libri, co-fondée par Domenico Procacci, producteur de Caos Calmo), a signé une adaptation théâtrale du film No Man's Land de Danis Tanovic, collabore à de nombreux journaux et revues, traduit de grands écrivains américains, adapte de dialogues de films étrangers, écrit des scénarios (notamment pour son frère Giovanni Veronesi, réalisateur), il
Antonello Grimaldi parle du travail d'adaptation, qui s'est avéré complexe : ""La première étape a été le choix de l'acteur principal. Nanni Moretti a participé à l'écriture du scénario, et il est évident que le personnage principal du roman a été adapté àhistoire qui aurait un centre l'acteur qui le joue. Pas tant pour le " morettiser ", comme je l'ai entendu ici ou là, mais pour aider à ce que fait tout acteur : s'approprier un rôle en choisissant ce qui lui semble le plus proche de lui. Ensuite, en transposant l'action de Milan à Rome, nous avons éliminé ce qui apparaissait en arrière-plan, le monde du show-biz et de la mode, en nous concentrant sur ce qui se passe sur la place. Nous avons fait aussi un autre choix, qui peut paraître paradoxal : faire que le film soit tout entier dédié à Pietro Paladini. De là est né un choix plus extrême encore : une unique, et ce centre serait le personnage principal, autour de qui tourneraient les autres personnages."
Nanni Moretti parle de ce qui l'a séduit dans le livre et dans son personnage : "Dès que j'ai lu le livre, j'ai eu envie d'interpréter Pietro Paladini, parce qu'il y a simultanément dans ce personnage des chosesproches de moi et des choses lointaines. Je ne me joue pas moi-même, je ne joue pas non plus l'un des personnages de mes propres films. Je sais que je ne peux pas tout jouer, mais je savais que je saurais le jouer lui. Le roman de Sandro Veronesi a rencontré un grand succès en Italie, à mon sens pour deux raisons : sa qualité littéraire, et le fait de montrer un homme qui a réussi sa vie professionnelle, et qui à un certain moment abandonne ses collègues, son bureau, son appartement, et s'installe en face de l'école de sa fille pour réfléchir. Raconter cette image dans un livre ou la montrer dans un film est une chose belle et importante. Elle restera, je crois, dans la mémoire des spectateurs."
Caos calmo s'est attiré les foudres de l'église catholique en Italie en raison d'une scène de sexe crue entre Nanni Moretti et Isabella Ferrari. Les spectateurs français seront sans doute moins choqués que surpris de voir le réalisateur cérébral de La Messe est finie dans une telle posture...
Il n'est pas si fréquent que Nanni Moretti accepte de jouer dans des films dont il n'est pas le réalisateur. Ses précédentes apparitions se comptent même sur les doigts d'une main... Il a fait deux compositons marquantes dans des films qui abordent des sujets chauds : la corruption dans Le Porteur de serviette de Daniele Luchetti en 1991 (il a obtenu un Donatello du meilleur acteur, l'équivalent italien du César, pour son rôle de ministre ambititeux) et le spectre des Brigades rouges dans La Seconda volta de Mimmo Calopresti en 1995 (il y incarne un prof, ancienne victime d'une terroriste interprétée par Valeria Bruni Tedeschi. Il faut préciser que Moretti s'ést particulièrement investi sur ces films, puisque sa société, la Sacher Films, en était coproductrice. Luchetti a également dirigé Moretti dans Domani, Domani (1988). Et l'auteur de Journal intime apparaît furtivement dans Je lis dans tes yeux de Valia Santella (2004) et dans Trois vies et une seule mort de Raoul Ruiz (1996), mais pour ce clin d'oeil, il n'est même pas crédité au générique...
Pour incarner Steiner, grand patron à la tête d'un empire médiatique, qui apparaît à la fin du film, le réalisateur a choisi un autre acteur-réalisateur légendaire... "La fusion montrée dans le film est en réalité celle de Telepiu, filiale de Canal + avec Stream, propriété de Rupert Murdoch. Pour jouer le rôle de Steiner, le " ponte " de l'opération, nous avions pensé à choisir un cinéaste connu : pour que ce personnage puisse se confronter non seulement à Pietro Paladini, mais aussi à Nanni Moretti. Il fallait donc un réalisateur important ! Nous avons échangé deux ou trois noms avant d'arriver à l'idée de Roman Polanski. Le mérite de l'avoir convaincu revient au producteur Domenico Procacci. C'est une scène que nous avons tournée le dernier jour, parce que jusqu'au bout nous n'étions pas sûrs que Polanski se libèrerait, et jusqu'au bout j'ai craint de devoir me maquiller et m'habiller en Steiner ! Et puis, heureusement, il est arrivé."
La mort est un sujet central dans Caos calmo... tout comme dans La Chambre du fils, le film de Nanni Moretti qui remporta la Palme d'or en 2001. "C'est un thème qui résonne peut-être davantage au fur et à mesure qu'on vieillit", analyse Moretti. "Les réactions à la douleur et à la mort sont différentes selon les films, et l'âge où je les ai faits. Dans La Chambre du fils, le noyau familial se brise en mille morceaux, dans Caos calmo, il se transforme, c'est nouveau noyau qui se crée, composé du père et de sa fille."
Le monde de la culture et des médias, dans lequel évoluent les personnages de Caos Calmo est un sujet sensible en Italie. Antonello Grimaldi confié avoir supprimé deux scènes dans lesquelles état développé un point de vue très critique : "Il y a des choses dans le film qu'on a dû couper, et qui, pourtant, nous avaient amusés : Pietro Paladini était directeur d'une chaîne cinéma, obligé parfois de programmer des choses terrifiantes, et Jean-Claude, le personnage joué par Hippolyte Girardot, lui reprochait sa programmation. Nous avons compris que cela n'avait pas grand-chose à voir avec le film ! Il y avait aussi une diatribe de Nanni – et celle-là était vraiment de lui ! – contre les cinéastes italiens, et nous l'avons complètement coupée."
Avec Paolo Sorrentino ou Matteo Garrone, Antonello Grimaldi fait partie des nombreux réalisateurs italiens à qui Nanni Moretti avait demandé de faire une apparition dans son film Le Caïman. Grimaldi y jouait le rôle d'un direcetur de production.