Habitué jusqu'en 2002 à incarner l'agent James Bond, Pierce Brosnan s'est mis en tête de collectionner les rôles de bad guys après son éviction des services secrets de sa Majesté. Tueur à gages sur le déclin dans The Matador - même les tueurs ont besoin d'amis et ennemi juré de Liam Neeson dans le western Seraphim Falls, c'est donc tout naturellement qu'il campe ici un dangereux kidnappeur.
C'est le scénariste et producteur anglais William Morrissey (The Rocket Post) qui est à l'origine du Chantage. Lorsque celui-ci a soumis le projet à la société irlandaise DreamTime, fondée par Pierce Brosnan, ce dernier s'est montré emballé. Les producteurs William Vince et Dave Valleau, de la société Infinity Features - auxquels on doit entre autres Truman Capote - acceptèrent également de s'embarquer dans l'aventure, avant d'être rejoints par Icon Entertainment International.
"Je voulais proposer au spectateur une histoire qui le surprenne," explique le scénariste William Morrissey. De fait, ce dernier a concocté une intrigue à la tension quasi palpable, sans pour autant chercher à manipuler le public. "Je souhaitais réunir tous les ingrédients d'un solide thriller, mais qui donne, au final, matière à réflexion," poursuit Morrissey. "Du coup, au moment du dénouement, on s'aperçoit qu'il s'agit bien plus qu'un simple thriller." Pour le scénariste, il s'agissait avant tout d'installer une situation dans laquelle le spectateur se demande constamment ce qu'il ferait s'il se retrouvait confronté à de telles circonstances.
Un bon thriller, c'est avant tout une question de rythme, raison pour laquelle le film démarre sur un tempo serein, qui nous fait comprendre que la vie s'écoule normalement, puis, "tandis que la tension monte d'un cran, les plans sont plus serrés, plus nerveux, plus sombres et tournés caméra à l'épaule," explique le réalisateur Mike Barker. Pour y parvenir, ce dernier a travaillé en étroite collaboration avec le chef-opérateur Ashley Rowe. "Au début du film, la caméra est immobile et les comédiens se déplacent dans le champ," signale-t-il. "A mesure que progresse l'intrigue, la caméra est de plus en plus rapide : on tourne d'abord des plans à la Dolly, puis à l'épaule. Le rythme est de plus en plus frénétique et le nombre de plans va crescendo, ce qui renforce la sensation de trouble. Vers la fin du film, on retrouve des plans fixes filmés au grand angle."Grâce au grand angle, les personnages s'imposent au premier plan, tandis que le spectateur comprend ce qui se passe autour d'eux. "Avec ce dispositif, on vit l'action de manière intense, comme si on était dans la tête du personnage et qu'on collait à ses pas," poursuit Ashley Rowe. L'équipe a utilisé un minimum d'éclairages, jouant davantage sur les surfaces réfléchissantes comme le verre, l'eau, les miroirs et le chrome.
Pour le réalisateur Mike Barker, Maria Bello est une comédienne au sens le plus noble du terme. Cette dernière signale au passage qu'Abby est un personnage avec lequel elle se sent profondément en phase : "Je n'arrive pas à analyser pourquoi j'accepte un rôle, mais quand j'ai lu ce scénario il y a un an et demi, j'ai été fascinée. J'ai aussitôt appelé mon agent et je lui ai dit que je voulais le jouer. Abbyn'arrive pas à se couler dans le rôle que lui a destiné son mari, Neil. Elle a abandonné la photographie, elle s'est entièrement consacrée à l'éducation de leur fils de 5 ans, mais quelque chose ne va pas. Elle a l'impression d'être une potiche, ce qui suscite chez elle un fort ressentiment."
"Je m'identifie très bien à ce sentiment-là, et c'est assez excitant de laisser s'exprimer sa part d'animalité," ajoute la comédienne. Les motivations d'Abby demeurent dans le non-dit : "J'ai essayé de lui donner de l'épaisseur," reprend Maria Bello, "mais par bonheur, j'ai travaillé avec deux formidables comédiens qui se donnent à 100%. Ils s'investissent tellement dans leurs personnages que j'arrive à trouver un sens profond à chacune de nos réactions."
Pour les décors, le réalisateur Mike Barker et le chef décorateur Rob Gray souhaitaient un style visuel proche des photos de Philip-Lorca DiCorcia, artiste qui s'est fait connaître grâce à ses clichés représentant des tranches de vie scrupuleusement chorégraphiées. Il s'avérait que le sentiment de solitude et d'introspection qui se dégageait de ses photos urbaines correspondait parfaitement au registre du film.
"Comme de nombreuses scènes se déroulent dans l'habitacle de la voiture, l'essentiel du décor se concentre sur le monde extérieur - un monde qui n'a que faire du cauchemar que traversent les protagonistes," explique Rob Gray. Ce contraste est facteur d'angoisse. Le fait que les personnages soient coupés du monde extérieur par une simple vitre de voiture ajoute à leur terrible sentiment d'impuissance. "C'est comme un bocal à poissons, et les décors mettent en valeur les fenêtres car on peut regarder à travers, vers l'intérieur de la voiture ou vers l'extérieur. Pour moi, c'est aussi une métaphore du personnage de Neil qui ne se rend pas compte qu'il est transparent." Le motif du bocal a d'ailleurs été décliné en jouant sur des surfaces réfléchissantes que l'on trouve dans chaque décor, y compris les rues qui ont été mouillées pour les scènes de nuit.
Le tournage s'est déroulé du 10 mars au 12 mai 2006 à Chicago et à Vancouver, au Canada.
Avant de s'intituler en VO Shattered, ce film avait pour titre Butterfly on a wheel.