Tout est parti d'une pièce de théâtre, intitulée Les Salons, qu'ont composée deux amis d'Anne Fontaine, Bernard Minoret et Claude Arnaud, à partir de la correspondance de Madame du Deffand et Julie deLespinasse. "C'est la chronique d'un rapport passionné et destructeur entre deux femmes dans le contexte brillantissime des salons du XVIIIe siècle, explique la réalisatrice. Ils en avaient tiré un scénario et j'étais décidée à les aider, sans avoir l'intention de le mettre en scène."
Philippe Carcassonne en détenait les droits et en a parlé au producteur Pascal Houzelot. C'est lui qui a convaincu la cinéaste d'adapter la pièce au cinéma.
Anne Fontaine se souvient : "Dès lors, j'ai été prise entre l'envie de traiter cette histoire qui me touchait et une réservequ'impliquait le film d'époque. Je ne me sentais pas assez à l'aise pour un film avec un contexte historique et j'avais peur d'y perdre une part de ma liberté. J'ai tergiversé quelque temps, puis j'ai malgré tout décidé de prendre le risque - à condition de trouver les deux actrices idéales."
La première rencontre d'Anne Fontaine avec Danielle Darrieux l'a beaucoup marquée. La réalisatrice se souvient : "Elle était étonnée qu'un metteur en scène de ma génération puisse penser à elle pour un tel personnage. Etrange coïncidence, elle avait d'ailleurs déjà croisé ce rôle plusieurs fois. J'ai été complètement charmée par sa personnalité, son énergie, le mélange de joie, de gaieté et de mélancolie totalement surmontée. Danielle est entièrement tournée vers l'avenir, elle a un rapport unique au temps."
Plus Anne Fontaine avançait sur ce projet, plus elle se sentait mal par rapport au carcan que constituait l'aspect historique. Entre-temps, elle a réalisé Entre ses mains et le projet a continué à évoluer en elle.
"Quand le moment de s'y mettre sérieusement est venu, je me suis sentie décalée, se souvient-elle. J'avais envie d'ironie et de second degré, ce qui était antinomique avec ce projet. Quelque chose ne me correspondait décidément pas. Bien que sensible aux sentiments et thèmes de l'histoire, je ne me voyais pas le faire. J'ai décidé d'aller voir Pascal Houzelot pour lui dire que je renonçais au projet. Je me suis sentie incroyablement libérée par cette décision. Pourtant, tout de suite après, j'ai songé aux grandes actrices qui m'avaient fait confiance et il me semblait impossible de prendre le téléphone pour annoncer à Danielle Darrieux l'abandon du projet ! Notre contact avait été si fort, j'avais tellement envie de travailler avec elle que je refusais de la perdre. Sur le trajet qui me conduisait chez Pascal Houzelot, un puzzle s'est mis en place dans mon esprit. Il y avait d'abord l'idée de ce metteur en scène excentrique qui allait rencontrer une actrice oubliée. J'ai raconté mon idée à Pascal, qui m'a donné son accord. Le lendemain, je suis allée revoir Danielle et je lui ai expliqué la nouvelle tournure du projet. Elle m'a regardée d'un air étonné, mais j'ai tout de suite décelé un accord tacite dans ses yeux..."
Avec Nouvelle chance, l'idée était aussi pour Anne Fontaine de rebondir sur le personnage d'Augustin créé par elle et interprété à deux reprises par son frère Jean-Chrétien Sibertin-Blanc dans Augustin (1995) et Augustin roi du kung-fu (1999).
Pour préparer son rôle, Arielle Dombasle s'est replongée dans les Salons de Madame du Deffand, et a lu tous les écrits de Julie de Lespinasse dont elle ne connaissait que des fragments. Elle a étudié savie, son goût des lettres, de la parole, de la littérature et de la grammaire, sa passion pour la science de l'époque - aussi bien la chimie que l'astrophysique. "C'est chez elle que s'estfaite l'Encyclopédie de Diderot, sommet des Lumières, explique l'actrice. Cette ambition féminine d'être à la hauteur des hommes était si révolutionnaire et sa manière d'aimer aussi si absolue..."
Pour des raisons de disponibilité du lieu, Anne Fontaine a débuté le tournage par les scènes du Ritz. "Personnen'avait jamais tourné à l'intérieur du Health Club mais nous ne pouvions en disposer que pendant deux jours et demi, raconte-t-elle. Nous étions tout de suite au coeur du sujet. Danielle Darrieux ne s'était pas baignée depuis dix ans, et elle appréhendait d'aller dans l'eau. Je ne l'ai pas forcée, nous y sommes allés petit à petit. La scène de rencontre aquatique avec le personnage d'Arielle Dombasle me paraissait essentielle et très représentative des idées insolites d'Augustin. Finalement, Danielle l'a fait et ce premier obstacle franchi en confiance a détendu bien des choses."
Pour Nouvelle chance, l'ancien Ministre de la Culture Jack Lang a accepté de faire une apparition sous forme de clin d'oeil. "Je trouvais intéressant que le personnage d'Augustin puisse aller braver quelqu'un comme Jack Lang, explique la réalisatrice. Augustin l'aborde avec autant de naturel et de liberté que s'il croisait n'importe qui dans la rue ! Sans être improvisée, cette scène avait été très préparée mais pas complètement écrite. J'avais demandé à Jack Lang de s'adapter à tout ce que lui dirait le personnage. Le contraste de la rencontre, le côté dérisoire de ce contact pour obtenir un petit lieu de répétition m'intéressait."
En 2006, le Festival de Cannes a souhaité rendre hommage à Danielle Darrieux à travers la présentation hors compétition de Nouvelle chance. Malheureusement, pour des raisons de santé, l'actrice n'a pu faire le déplacement sur la Croisette pour cet événement.