Emmené par Roschdy Zem et Léa Seydoux, Roubaix, une lumière marque la première incursion d'Arnaud Desplechin dans le polar. Pour concevoir ce film réaliste, diffusé ce dimanche soir sur Arte, le réalisateur s'est basé sur un fait divers de 2002 : le meurtre d'une personne âgée par un couple de jeunes femmes toxicomanes, retranscrit dans un documentaire où elles ont avoué leur crime, "Roubaix commissariat central, affaires courantes". Cette immersion puissante, également centrée sur d'autres types d'affaires, a été réalisée par Mosco Boucault en 2002 puis diffusée pour la première fois en 2008.
De par leur authenticité qui fait froid dans le dos, les images du documentaire ont particulièrement marqué Arnaud Desplechin. "Comme le prologue du scénario l’indique : j’ai voulu ici ne rien offrir à l’imagination, ne rien inventer, mais retravailler des images vues à la télévision il y a 10 ans, et qui n’ont cessé de me hanter depuis", déclare le réalisateur. "Pourquoi n’ai-je jamais pu oublier ces images ? C’est que d’habitude, je ne sais m’identifier qu’aux victimes. Je n’aime pas beaucoup les bourreaux. Et pour la première et unique fois de ma vie, chez deux criminelles, je découvrais deux soeurs."
Sans commentaire et jugement, "Roubaix commissariat central, affaires courantes" constitue un document exceptionnel sur le travail des policiers et la criminalité dans cette ville du nord de la France (où le taux de chômage est l'un des plus importants de l'Hexagone). De même qu'Arnaud Desplechin, Mosco Boucault n'a pas voulu montrer Roubaix sous un aspect trop misérabiliste : les enquêteurs sont déterminés mais compatissants, et les accusés apparaissent de manière terriblement banale, voire humaine (même dans le cas des deux meurtrières).
Sorti en 2019, Roubaix, une lumière a réalisé environ 380 000 entrées en France. Un score plutôt bon compte tenu de son aspect anti-spectaculaire. Il a, de plus, été très bien accueilli par la presse et a fait parler de lui à travers divers festivals, comme à Cannes où il a été présenté en Compétition. Aux César 2020, le film d'Arnaud Desplechin a été nommé dans sept catégories et a permis à Roschdy Zem d'être sacré Meilleur acteur. Une récompense méritée tant le comédien excelle dans la peau de ce commissaire expérimenté et humain.
Antoine Reinartz évoque "Roubaix, une lumière" :