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    The Power of the Dog sur Netflix : Jane Campion signe-t-elle son plus grand film ?
    Emilie Semiramoth
    Emilie Semiramoth
    Cheffe du pôle streaming, elle a été biberonnée aux séries et au cinéma d'auteur. Elle ne cache pas son penchant pour la pop culture dans toutes ses excentricités. De la bromance entre Spock et Kirk dans Star Trek aux désillusions de Mulholland Drive de Lynch, elle ignore les frontières des genres.

    Jane Campion revient aux longs métrages 12 ans après Bright Star. La néo-zélandaise signe un western qui n’en est pas vraiment un, avec Benedict Cumberbatch dans ce qui semble être son meilleur rôle.

    De quoi ça parle ?

    Originaires du Montana, les frères Phil et George Burbank sont diamétralement opposés. Autant Phil est raffiné, brillant et cruel – autant George est flegmatique, méticuleux et bienveillant. À eux deux, ils sont à la tête du plus gros ranch de la vallée du Montana.

    Une région, loin de la modernité galopante du XXème siècle, où les hommes assument toujours leur virilité et où l'on vénère la figure de Bronco Henry, le plus grand cow-boy que Phil ait jamais rencontré.

    Lorsque George épouse en secret Rose, une jeune veuve, Phil, ivre de colère, se met en tête d'anéantir celle-ci. Il cherche alors à atteindre Rose en se servant de son fils Peter, garçon sensible et efféminé, comme d'un pion dans sa stratégie sadique et sans merci…

    The Power of the Dog, un film écrit et réalisé par Jane Campion avec Benedict Cumberbatch, Kirsten Dunst, Kodi Smit-McPhee, Jesse Plemons… D’après le livre éponyme de Thomas Savage

    The Power of the Dog
    The Power of the Dog
    Sortie : 1 décembre 2021 | 2h 08min
    De Jane Campion
    Avec Benedict Cumberbatch, Kirsten Dunst, Jesse Plemons
    Presse
    3,9
    Spectateurs
    3,5
    Voir sur Netflix

    C’est avec qui ?

    Pour The Power of the Dog, son huitième long métrage, Jane Campion s’est entourée d’acteurs au sommet de leur art. Benedict Cumberbatch, en tête, incarne le personnage principal. Phil Burbank est un cowboy, qui se fond corps et âme dans sa vocation, à la tête du ranch familial avec son frère George (Jesse Plemons) avec lequel il forme une sorte de drôle de petit couple.

    Autant Phil est un homme assertif, dur, voire cruel, autant George est un homme doux et discret. Ce dernier n’est d’ailleurs pas considéré comme leur patron par les autres cowboys qui n’ont d’yeux que pour Phil, leur leader naturel.

    KIRSTY GRIFFIN/NETFLIX

    Ce fragile équilibre entre les deux frères bascule lorsque George décide d’épouser Rose (Kirsten Dunst), une jeune veuve à la tête d’un restaurant et mère de Peter (Kodi Smit-McPhee). Rose et Peter représentent tout ce que Phil méprise : Rose, la veuve joyeuse qui lui vole son frère, et Peter, ce jeune homme d’apparence fragile et aux antipodes de l’idéal masculin de Phil.

    Ça vaut le coup d’œil ?

    On ne s’attendait pas à voir Jane Campion revenir avec un western. Ce genre, qui a souvent servi une forme d’apologie de la virilité, elle le détourne comme elle seule peut le faire. Ça commence par la sensualité de son image et sa manière de dompter la beauté crue des paysages du Montana. Elle s’associe d’ailleurs pour la première fois à la directrice de la photographie Ari Wegner. Et quelle heureuse rencontre !

    Mais Jane Campion opère son détournement avant tout en jouant sur les genres – filmiques et sexuels – et en dressant le portrait d’un homme complexe et secret, entier et intransigeant, cruel et interdit d’amour.

    KIRSTY GRIFFIN/NETFLIX

    Tout le film se déroule en non-dits. Tout se devine au fil d’une construction qui prend soin de ne jamais révéler ses intentions. Phil est un homme qui règne par la terreur et qui ne connaît que la brutalité. Mais celle-ci ne s’exprime pas par la puissance physique. Plutôt par la perfidie. Il n’échappera pourtant pas au spectateur la transformation physique de Benedict Cumberbatch, qui arbore une musculature sèche qu’on ne lui avait jamais vue.

    Car derrière ce personnage taciturne et volontiers belliqueux, s’en cache un autre qui ne veut, ne peut pas sortir de l’ombre. Avec The Power of the Dog, Jane Campion signe un film d’une incroyable sensualité. La complexité de Phil tient aussi à son rapport presque primaire à la nature. Son havre de paix, il le trouve dans un coin isolé d’une rivière où il se baigne et se roule dans la boue. 

    Dans ces moments d’abandon, la caméra de Jane Campion reste à distance. Mais l’érotisme embrase tout le cadre alors que la pudeur reste de mise.

    KIRSTY GRIFFIN/NETFLIX

    Dans un mouvement tout aussi naturel, couvert de boue et de sueur qui forment sa carapace, il décide de faire de Rose sa victime. Il distille savamment son venin au point de la pousser à la boisson. Et lorsqu’il dirige son attention vers Peter – qu’on découvre au début du film en train de faire des fleurs en papier pour habiller les tables du restaurant de sa mère – on tremble.

    Tout en jambes, avec sa frêle silhouette, Peter semble pourtant indifférent au fruste Phil. C’est cette confrontation silencieuse qui va nous tenir en haleine tout au long du film. Jusqu’à la toute dernière scène, ce thriller psychologique prend une tournure et un sens inattendus. C’est là que l’émotion et la stupéfaction triomphent.

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