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    Parents d'élèves de Noémie Saglio : "Un film qui parle à la fois aux parents et aux enfants"
    Julia Fernandez
    Julia Fernandez
    -Journaliste Séries TV
    Elevée à « La Trilogie du samedi », accro aux séries HBO, aux sitcoms et aux dramas britanniques, elle suit avec curiosité et enthousiasme l’évolution des séries françaises. Peu importe le genre et le format, tant que les fictions sortent des sentiers battus et aident la société à se raconter.

    Rencontre avec la réalisatrice de "Plan Cœur" à l'occasion de la sortie de son nouveau long-métrage, dans lequel un baby-sitter nonchalant infiltre la tribu des parents d’élèves de l'enfant dont il a la charge pour tenter de séduire son institutrice.

    Vous revenez au cinéma avec Parents d'élèves, trois ans après la sortie de Telle Mère, Telle Fille. Quel a été le point de départ du film ?

    Noémie Saglio, réalisatrice : Les deux scénaristes, Alice Girard et Marinette Lévy, avaient développé l'idée originale et quelques pages de scénario, qu'elles m'ont proposé, et j'ai dit oui, mais au même moment où je suis tombée enceinte. Je leur ai alors dit de ne pas m'attendre et de prendre quelqu'un d'autre, et finalement elles m'ont attendu un an, et on a beaucoup travaillé ensemble à partir de ce premier jet. L'idée de départ, c'est qu'on partageait un peu ce côté parents d'élèves nous-mêmes, on a des enfants du même âge toutes les trois. Le film est né d'une envie commune de faire un film dans le milieu scolaire, qui parle à la fois aux parents et aux enfants, et qui ressemble à plein de films de notre génération qui nous ont marqués, comme Génial, mes parents divorcent, Nos Jours heureux... Des films qu'on peut regarder avec nos enfants sans s'ennuyer !

    L'école est une arène assez rebattue au cinéma, mais ici vous explorez plus en profondeur les angoisses et les aspirations que les parents peuvent transmettre souvent malgré eux à leur progéniture. Le film interroge aussi la manière dont il est possible de s'épanouir à travers son éducation. Quel constat faites-vous dessus ?

    Aujourd'hui, les parents - et je m'inclus dedans - tendent à considérer l'école comme un produit sur lequel on a notre mot à dire. Ce qui n'était pas le cas avant ! Maintenant les parents remettent tout en question, car on est tellement habitué à tout noter et tout évaluer, qu'on en viendrait presque à chercher un classement des meilleures écoles comme quand on cherche un hôtel ! Ce côté "produit" me fait beaucoup rire. On en est pas là, mais dans les réunions de parents d'élèves on a tendance à mettre notre enfant avant ceux des autres en posant des questions spécifiques... 

    Revenir au long-métrage après deux saisons de Plan Cœur était-il un moyen de retrouver un rythme de production plus confortable ?

    Je n'ai jamais vraiment quitté le cinéma ! Mais j'adore faire les deux. En effet, même si c'est très léger, il y a un tout petit peu plus de confort au cinéma sur le temps de tournage. Plan Cœur, ça a été très rock. Mais il y a un aspect que j'adore avec les séries, c'est leur côté démocratique, on ne fait pas payer les gens à l'unité - tandis qu'au cinéma justement on met un prix car aller voir un film est un événement en soi. Les deux se complètement, et je suis contente de pouvoir raconter des histoires sur tous les supports possibles. 

    Avec Parents d'élèves, on ne déroge pas aux registres de la romance et de la comédie dont vous êtes familière. On y suit Vincent, véritable adulescent qui a du mal avec les responsabilités. Après avoir mis en scène de nombreuses héroïnes, est-ce que ce nouveau héros masculin vous a servi à créer un décalage, d'aller toucher à des sujets inexplorés ?

    J'ai toujours eu l'impression que mon but était de montrer un maximum de diversité de personnages, hommes ou femmes, et de montrer qu'ils ne sont pas obligés de rentrer dans les codes de leur genre, ni moi du mien. Si je fais une comédie romantique, ça n'inclut pas les stéréotypes qui vont avec. Tu peux, comme dans Parents d'élèves, être un mec et ne pas être obsédé par la réussite professionnelle, l'argent, ni être un mâle alpha viril, et tu peux être une meuf et avoir des problèmes de monoparentalité, être une maîtresse qui parfois ouvre sa gueule et a envie d'être aimée. A chaque fois, ce sont des personnages qui ont plein d'aspérités, qui sont "pas finis" comme le dit Vincent. Dans ma vie, j'ai tendance à vouloir tout le temps m'améliorer. Et pourtant, je retombe souvent dans les mêmes travers. Et tout le monde est comme ça, en fait ! La vie est un éternel travail sur soi. J'essaie de faire transparaître cette notion en créant des personnages dans lesquels on se retrouve car ils ont des failles et de gros défauts, mais on les aime quand même. 

    C'est le cas du personnage de Vincent, pris dans un engrenage de mensonge mais qui décide de l'entretenir car la situation le rend heureux.

    Vincent c'est l'exemple typique du jeune homme qui ne se retrouve pas dans les schémas de virilité traditionnels, et c'est un personnage auquel beaucoup peuvent s'identifier, y compris des femmes ! Je ne me retrouve pas dans ces injonctions de féminité parfaite, de ces femmes toujours au top qui ont l'air d'être de super bonnes mères et d'arriver à manger sain tout en faisant des selfies... Je ne me retrouve pas là-dedans donc j'essaie de montrer autre chose !

    Qu'est-ce qui vous a plus dans le duo d'acteurs formé par Vincent Dedienne et Camélia Jordana ? Les aviez-vous déjà en tête pendant la préparation du film ?

    J'avais Vincent en tête depuis assez longtemps, on a une vraie gémellité sur la sincérité et le sens de la vanne, le fait d'être très émotif mais d'avoir tout le temps envie de faire des blagues, et de vouloir être aimé à tout prix ! (rires) On est très proches, et on a beaucoup réécrit ensemble. Avec Camélia, c'est drôle car je ressens plus le décalage de génération. Elle m'éduque énormément sur plein de choses liées au féminisme, de trucs où j'avais avant l'impression d'avoir un niveau avancé, mais en fait pas du tout. La jeune génération actuelle est bien plus déconstruite que nous, et ils sont très vifs d'esprit ! Camélia me reprenait automatiquement lorsque je disais un truc incorrect, et j'adore la manière dont elle le faisait, parfois d'un simple regard en me disant "ben non, Noémie !" (rires) Et nous on a tellement baignés là-dedans, moi mes parents sont de véritables boomers, avec cette pensée de "sois-belle et tais-toi" pour les femmes. J'exagère un peu car ils ont des côtés très modernes, mais ce sont de vrais soixante-huitards. 

    Comment avez-vous dirigé les nombreux enfants sur le tournage ? En aviez-vous déjà fait l'expérience ?

    Oh vous savez j'ai neuf frères et sœurs, alors… (rires) J'avais une coach enfant sur le tournage, avec laquelle on a beaucoup répété en amont. On a mis les enfants dans un univers où ils se retrouvaient, et en même temps ils connaissaient les limites de leurs personnages. Ils pouvaient être eux-mêmes, ils restaient des enfants. J'avais aussi choisi les parents et les enfants par paire, un peu comme dans Les 101 Dalmatiens, je voulais qu'il y avait un vrai effet de mimétisme et de gémellité. J'ai fait le casting des adultes et des enfants en parallèle, et ensuite je les ai faits se rencontrer. Ce qui était drôle sur le tournage, c'est que chaque parent s'occupait de son enfant en tant qu'acteur, ils se sont auto-gérés. Ca s'est révélé étonnamment facile, et comme ils allaient bien ensembles, ils se sont entendus. 

    Vous avez dernièrement sorti un épisode inédit de Plan Cœur sur Netflix ayant pour thème le confinement. Comment s'est déroulée la préparation ?

    On l'a écrit hyper vite, et on l'a tourné deux semaines après avoir été déconfinés. Ca a était fait avec les moyens du bord : on a tourné dans ma maison de campagne, le bébé d'Emilie est joué par mon fils, la femme qui voit le sexe de Maxime, c'est ma mère... (rires) C'était de la débrouille car on avait beaucoup de contraintes, on avait pas le droit de rajouter d'autres acteurs, pas le droit de mettre plus de deux acteurs au même endroit... C'est aussi pour ça qu'on a décidé de jouer de cette contrainte en faisant que les personnages restaient chacun chez eux. Sinon on les aurait tous fait confiner ensemble et ç'aurait été drôle aussi, mais au final le résultat fonctionne très bien ! J'aime beaucoup cet épisode, je le trouve touchant, il incarne un instantané du moment. Ca va rester, et ce sera toujours particulier de regarder ce qu'on a vécu à posteriori. Même en le regardant aujourd'hui, beaucoup de gens m'ont dit qu'ils avaient été surpris de voir qu'ils avaient oublié certaines habitudes acquises pendant le confinement. On était tous hyper contents de retravailler, car on redoutait de vivre un arrêt prolongé des tournages. On adore ces personnages, et on était très contents de les retrouver.

    Parents d'élèves
    Parents d'élèves
    Sortie : 7 octobre 2020 | 1h 29min
    De Noémie Saglio
    Avec Vincent Dedienne, Camélia Jordana, Alix Poisson
    Presse
    3,1
    Spectateurs
    2,6
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