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    Carnival Row sur Amazon : que vaut la série féérique avec Orlando Bloom et Cara Delevingne ?
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    On a vu toute la saison 1 de "Carnival Row"', nouvelle série d'Amazon Prime Vidéo, disponible ce vendredi 30 août. Et voici ce que l'on retient de cette histoire aux accents policiers et fantastiques portée par Orlando Bloom et Cara Delevingne.

    Amazon Prime Video

    DE QUOI ÇA PARLE ?

    Dans un monde fantastique à l’époque victorienne, où les créatures mythologiques doivent cohabiter avec les humains, le détective Rycroft Philostrate et une fée réfugiée du nom de Vignette Stonemoss vivent une dangereuse relation au cœur d’une société de plus en plus intolérante.

    Carnival Row avec Orlando Bloom, Cara Delevingne... - Crée par Travis BeachamRené Echevarria

    Disponible sur Amazon Prime Video depuis le 30 août - Épisodes vus : 8 sur 8

    ÇA RESSEMBLE À QUOI ?

    NOTRE AVIS

    Après avoir été l'une des sirènes de Pan et l'Enchantresse de Suicide Squad, Cara Delevingne ajoute une créature magique de plus à son bestiaire fantastique d'actrice, en incarnant une fée. Sur petit écran et aux côtés d'Orlando Bloom. Un mois après le succès de The Boys, Amazon Prime Video nous présente son nouveau bébé : Carnival Row. Une série qui, sur le papier, ne manque pas d'atouts, entre son casting, son univers où cohabitent êtres mythologiques et humains, et son postulat, qui nous entraîne sur les traces d'un monstrueux tueur en série alors que l'intolérance qui règne et grandit dans la societé dépeinte pourrait être plus dangereuse encore. D'où une ambiance sombre à souhait, qu'une photo froide oscillant entre le bleu, le vert et le gris, vient renforcer.

    C'est d'ailleurs ce qui nous frappe en premier lieu : la beauté de l'ensemble. Des décors aux costumes en passant par les effets spéciaux (à l'exception des loups-garous que l'on croise dans la scène d'ouverture puis l'épisode 4 et qui sont à peine plus beaux que celui d'Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban), la série est une réussite sur ce plan. Les fées paraissent plus vraies que nature et les acteurs ne donnent pas l'impression d'évoluer devant des fonds verts, ce qui facilite l'immersion dans les rues mal famées de cette ville fictive d'inspiration victorienne et lovecraftienne, où le danger semble guetter à chaque coin de rue, sous une forme ou sous une autre. Comme si les univers de Sherlock Holmes et de Jack l'Éventreur s'étaient donnés rendez-vous sur petit écran.

    Amazon Prime Video

    Car c'est bien une affaire de meurtres aussi violents que mystérieux qui se met en place dans les dernières minutes d'un pilote qui a pris soin de nous faire découvrir les lieux aux côtés du personnage de Vignette Stonemoss (Cara Delevingne), fée qui a réussi à s'échapper de l'île sur laquelle les siens étaient comme retenus prisonniers, avant de survivre au naufrage du bateau qui devait la conduire sur la terre ferme. Un épisode qui donne le ton et nous fait comprendre qu'il sera davantage question des personnages que du côté policier, qui ne se lance vraiment qu'à la toute fin, lorsqu'une femme est assassinée par une créature dont nous distinguons un peu l'aspect monstrueux. Et si nous avons le fin mot de l'histoire à l'issue de la saison, il faut néanmoins s'armer de patience.

    En matière de rythme, Carnival Row est au diapason du personnage joué par Orlando Bloom : ses secrets et sa complexité se révèlent au fil du récit, mais l'ensemble n'est que trop rarement trépidant. C'est même l'ennui qui prédomine lors des quatre premiers épisodes (sur huit), dénués d'humour et destinés à poser les bases d'un univers et présenter les personnages qu'un fil rouge va réunir. Plus ou moins, car l'une des sous-intrigues paraît déconnectée de l'enquête centrale : la relation ombrageuse entre un frère (Andrew Gower) et une soeur (Tamzin Merchant) au bord de la ruine depuis le naufrage du bateau appartenant à leur famille, alors que la seconde se rapproche du faune (David Gyasi) qui entend bien leur asséner le coup de grâce pour se venger son peuple trop souvent réduit au rang de serviteur.

    Prise entre sa volonté de nous tenir en haleine et la nécessité de présenter un monde que nous visiterons pendant (au moins) deux saisons, la série paraît victime de son ambition et risque de perdre bon nombre de téléspectateurs sur sa première moitié, lente et dont on peine à saisir le but, entre l'histoire d'un fils dont le kidnapping a été organisé par sa propre mère focalisée sur une prophétie ayant promis de grandes choses au jeune homme ; une société secrète, Black Raven, qu'intègre Vignette ; et ses retrouvailles avec Rycroft, qui s'était fait passer pour mort auprès d'elle quelques années auparavant, et serait à l'origine de tous ses malheurs depuis. Une relation dont l'épisode 4, en forme de long flashback, nous présente les origines, en plus de revenir sur le passé de soldat du héros, devenu détective privé ensuite.

    L'OMBRE DE GUILLERMO DEL TORO

    Et c'est à partir de là que la sauce prend. Si l'alchimie entre Cara Delevingne et Orlando Bloom n'est pas ce que la série nous offre de plus réussi, l'acteur du Seigneur des Anneaux tire son épingle du jeu et rappelle qu'il possède une palette plus nuancée que ce que l'on avait pu croire. Ça n'est d'ailleurs pas une coïncidence si l'ensemble s'améliore au fur et à mesure que le mystère qui l'entoure s'éclaircit, laissant entrevoir ses failles. Une mise à nu qui, justement, débute vraiment avec la belle scène d'amour que nous offre l'épisode 4. Avec les ailes de la fée qui brillent joliment par intermittence, la séquence illustre bien la façon dont les effets spéciaux sont utilisés de façon pertinente et parcimonieuse, alors que deux races s'unissent sous nos yeux.

    Il y a clairement du Guillermo del Toro dans cette scène, ou celle entre David Gyasi et Tazmin Merchant qui intervient un peu plus tard. Et ça n'est pas un hasard dans la mesure où le réalisateur de La Forme de l'eau devait initialement co-écrire et produire cette série adaptée d'un script de film signé Travis Beacham, co-créateur du show et scénariste de Pacific Rim. Il n'est d'ailleurs pas interdit de penser au marché de Hellboy II lorsque l'ensemble nous plonge dans le quotidien de la ville, en sachant que l'on retrouve beaucoup d'éléments et thèmes caractéristiques de son oeuvre. À commencer par la monstruosité, le mariage entre le réel et le fantastique et l'aspect conte de fées noir de l'ensemble dont l'époque n'est pas clairement définie, comme pour faciliter le parallèle avec la nôtre.

    L'inspiration victorienne est bien évidemment assumée, mais l'ambiance rappelle également celle de l'entre-deux Guerres avec la montée des nationalismes et de l'intolérance, tout comme elle fait écho à notre actualité lorsque le mot "migrant" est employé pour qualifier les fées qui ont quitté leur territoire ravagé. La métaphore est parfois appuyée, alors qu'il n'est pas difficile de saisir ce que chaque race représente, mais c'est dans son versant politique que réside l'un des points forts de Carnival Row, avec le personnage d'Orlando Bloom qui fait le lien entre les espèces et les intrigues, appuyant l'idée de collision entre les espèces et les classes, alors qu'un système semble sur le point de s'effrondrer. Dommage qu'il faille attendre le quatrième épisode que la série prenne, enfin, la mesure de son potentiel.

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    Pas totalement car ce sont bien les deux derniers épisodes qui sont les plus réussis, lorsque l'histoire de meurtres se résout autour d'affaires de famille et de prophétie mal interprétée, et que la suite se met en place. Renouvelée pour une saison 2 un mois avant la diffusion de la première, Carnival Row n'a clairement pas été envisagée comme un "one shot" et nous le fait bien sentir. Car l'enquête qui sert de fil rouge, en plus de nous révéler qui est vraiment Rycroft, fait surtout office d'étincelle pour mettre le feu aux poudres et exacerber les tensions qui règnent dans la ville entre humains et créatures : les vraies monstres ne sont pas ceux que l'on pense, et les fées sont désormais sous la menace d'une traque "jusqu'aux confins du monde" menée par les nouveaux pouvoirs politiques en place. Le season finale marque ainsi la fin d'un cycle et le début d'un nouveau, plus totalitaire et dangereux pour les héros.

    La métaphore politique est toujours présente et le show tease ce qu'elle nous réserve ensuite : "Le vrai jeu va commencer", déclare l'un des personnages après avoir annoncé que "le chaos créé des opportunités". À la série de les saisir, car tout porte donc à croire que les choses sérieuses débuteront vraiment dans la saison 2, et que la 1 n'était qu'une introduction. Parfois trop longue et scolaire dans sa manière de nous présenter les différents lieux de son univers comme un jeu vidéo le ferait. Trop chargée au point que toutes les intrigues ne se rejoignent pas dans le final. Déséquilibrée aussi, car des personnages sont beaucoup trop en retrait, à l'image de Tourmaline, prostituée incarnée par Karla Crome (Misfits) qui fait le lien entre plusieurs protagonistes. Mais belle, et intéressante pour qui aura eu la patience de ne pas lâcher.

    Il y a bien sûr quelque chose de rageant, d'agaçant même, lorsque l'on vous dit de patienter pendant deux ou trois épisodes de près d'une heure chacun avant que l'ensemble ne devienne bien. Et il est clair que la série prend un peu trop son temps. Mais notre patience finit par être récompensée, à tel point que c'est sur une note frustrante que s'achève cette saison 1, avec les belles promesses de noirceur, de conflits et de destins à accomplir qu'elle nous fait pour l'avenir. Si l'esthétique est toujours aussi soignée, et que le récit devient plus captivant, c'est à ce moment que Carnival Row risque de faire partie de celles qui comptent. Avec vu du potentiel de son univers, ce serait dommage que ce ne soit pas le cas.

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