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    Minuscule 2 : rencontre avec les réalisateurs Hélène Giraud et Thomas Szabo
    Laëtitia Forhan
    Laëtitia Forhan
    -Chef de rubrique cinéma
    Fan de cinéma fantastique, de thrillers, et d’animation, elle rejoint la rédaction d’AlloCiné en 2007. Elle navigue depuis entre écriture d'articles, rencontres passionnantes et couvertures de festivals.

    5 ans après Minuscule - La Vallée des fourmis perdues, Hélène Giraud et Thomas Szabo nous présentent leur second long-métrage, Minuscule - Les Mandibules du bout du monde. Le film d'aventure sort en salles ce mercredi. Rencontre...

    AlloCiné: Minuscule est l'histoire d'un succès français. Imaginiez-vous – la 1ère fois que vous avez montré votre court-métrage "Mouches à merde" – l'engouement qu'allait créer cet univers ?

    Thomas Szabo : Pas du tout, d'autant que j'avais fait ce court-métrage, à l'époque, pour chercher du travail. "Mouche à merde" était censé aller sur une bande démo pour démarcher des boîtes de pub en particulier. J'étais loin d'imaginer que Philippe Delarue le verrait et aurait envie d'en faire une série et tout ce qui s'en suit. D'autant plus que je ne voulais plus entendre parler de séries à l'époque, j'avais travaillé sur Les zinzins de l'espace et Oggy et les cafards et je voulais passer à la prise de vue réelle.

    Hélène Giraud : De mon côté j'ai toujours aimé créer des univers en design, avec une préférence pour le fantastique et la SF. Avec ce court-métrage on a senti qu'il y avait un potentiel, mais on ne pouvait pas imaginer que ça deviendrait un long-métrage à l'époque. L'idée a commencé à germer dans nos têtes alors que nous étions en train de faire la série. On trouvait intéressant de prendre des choses minuscules et de leur donner une ampleur cinématographique, fait sérieusement au premier degré en scope, avec de la belle musique et une histoire prenante.  

    Vous avez remporté le César du Meilleur film d'animation en 2015, est-ce que ce prix vous a aidé pour la suite de l'aventure ?

    Hélène Giraud : Décrocher le César du meilleur film nous a permis de faire le 2ème long métrage. Grâce à lui on nous accordé une confiance plus large sur le projet, parce que pas mal de gens ne croyaient pas au passage de la série au long, mais il faut dire qu'avant, beaucoup ne croyaient pas non plus à la série... Une série sans dialogues, sans musique ouhhh...

    Grâce au César, tous ces doutes avaient disparu. Mais ce n'est pas pour autant que le financement est arrivé d'un coup. On devait faire le film en 3 ans (1 an d'écriture, de storyboard et de repérages et 2 ans de fabrication), ça en a finalement pris 4, parce que pour financer certaines parties il fallait attendre un peu. Mais au final on a réussi à faire le film que nous voulions. Pour Minuscule 2, le budget est d'environ 13 millions d'euros – c'est très serré pour un film d'animation, il fallait donc être très précis.  

    BORDE-JACOVIDES / BESTIMAGE

    Pouvez-vous nous expliquer l'envers du décor ? Comment vous partagez-vous le travail ? Comment se déroule le tournage du film, avant l'incrustation des insectes animés ?

    TS : Je m'occupe plus particulièrement de la mise en scène et Hélène s'occupe de la direction artistique. Ce qui ne nous empêche pas de nous consulter, mais voilà comment nous nous répartissons les tâches. Tout ce qui est rendu, design, décors, étalonnage c'est Hélène et tout ce qui montage, tournage, animation c'est moi.

    Tout est très préparé, on écrit un traitement qui donne une trame de l'histoire, ensuite on fait un storyboard avec lequel on va sur les lieux de tournage qui ont été choisis lors des repérages et on cherche les endroits qui vont correspondre le mieux possible à ce qu'on a dessiné. Ce n'est pas un storyboard très précis mais il donne l'indication de ce qu'on veut voir à l'image. Quand on a trouvé, on refait le storyboard en fonction des lieux. Une fois que tout est prêt on revient pour tourner.

    On filme les lieux vides et on monte les images, à cet instant il n'y a toujours pas d'animation. Quand on tourne un insecte qui se balade sur un cailloux par exemple, on filme le caillou seul, mais on met une référence pour l'ombre, la taille,...

    "Filmer du vide"

    HG : Pour être plus précis, quand on est sur le tournage il y'a les équipes, la caméra, l'éclairage,... Thomas leur explique en leur montrant la case du storyboard, parce qu'au début les équipes ne comprenaient pas ce qui se passait car c'est filmer du vide quand même ! Donc au début, Thomas prenait une photo de la scène et faisait un petit dessin afin qu'ils comprennent. Parce que tout est dans notre tête, on sait ce qu'on veut faire, mais si on veut un mouvement de caméra, il faut pouvoir expliquer au chef opérateur ce qui se passe.

    TS : C'était surtout sur le 1er film ça, parce que c'était nouveau pour tout le monde et on filmait des rochers où rien ne se passait. J'étais le seul à imaginer le déplacement de la bestiole, du coup tout le monde me regardait en se demandant si je savais vraiment ce que je faisais, mais ils ont très rapidement compris le truc. Sur le deuxième film nous avons travaillé avec les mêmes équipes donc tout le monde savait à quoi allait ressembler le résultat final.

    Une fois que les images sont montées, on les imprime et on dessine précisément sous Photoshop; la taille, la position des personnages et leur trajectoire. On envoie ensuite tout ça aux animateurs qui animent avec les intentions et les indications qu'on leur donne.

    Futurikon Films

    Les Mandibules du bout du monde se déroule en Guadeloupe, c'est un vrai film d'aventure. Quelles ont été vos influences ? L'idée de faire voyager les insectes à bord d'un bateau de pirate est géniale.

    HG: Dès le départ nous souhaitions garder les mêmes personnages, parce qu'on s'est attaché à eux et on a senti que le public les aimait. Les placer dans un nouvel environnement était donc parfait, on a pu renouveler les situations et trouver de nouveaux personnages, tout en gardant nos héros. En tournant le film en Guadeloupe on a assez vite pensé à Pirates des Caraïbes, de ce fait, le Galion de l'araignée s'est assez vite imposé.

    TS: Tourner le film en Guadeloupe est un vieux rêve, on y passe nos vacances depuis 20 ans. Déjà à l'époque de la 1ère saison nous souhaitions tourner la saison 2 là-bas mais le producteur nous a dit que c'était trop cher, on a donc rangé la Guadeloupe dans un tiroir et quand on nous a demandé de faire la suite du long-métrage on s'est dit "Tiens, et si on ressortait La Guadeloupe!"

    Comme références pour ce film nous avions les films d'aventure qui nous ont bercé quand nous étions plus jeunes et auxquels nous souhaitions rendre hommage : Les dents de la mer, Le Septième Voyage de Sinbad, La Canonnière du Yang-Tsé...

    Futurikon Films

    Minuscule est une oeuvre très écolo parce qu'il permet aux plus jeunes de se familiariser avec les insectes et de ne pas en avoir peur...

    HG: Tout à fait et ça c'est génial ! Dès la diffusion de la série, des parents ont commencé à nous dire que, grâce à Minuscule, leurs enfants n'écrasaient plus les fourmis parce qu'ils les voient différemment. C'est le plus beau des compliments. Nous sommes du genre à ne pas tuer les araignées par exemple, on les met dehors. Excepté les moustiques, les autres insectes on les laisse tranquilles. (rires) On sait que plein de gens ont la phobie des araignées par exemple, du coup il a fallu trouver un design pour qu'on reconnaisse tout de suite que c'en est une mais qu'en même temps elle ne soit pas effrayante afin que ça ne répugne pas le public.

    Futurikon Films

    Jusqu'ici les humains n'apparaissaient que de dos, ils sont plus présents dans ce film et ce sont des acteurs connus  (Bruno Salomone et Thierry Frémont). Pourquoi avoir décidé d'intégrer un peu plus d'humain ?

    TS : On voulait aller plus loin dans l'interaction et ne pas rester dans le principe de la série. On souhaitait ajouter les humains et voir comment un monde influence l'autre. Ça nous amusait, et puis il faut avouer que j'avais envie de tourner avec des humains (rires).

    HG : Il y a des gens que ça gêne, mais on a fait en sorte que ça reste dans l'univers Minuscule, parce que, d'une certaine manière, les humains font partie du décor. La caméra va à l'échelle humaine pour repartir à l'échelle des insectes. Ça nous rappelle que les insectes font partie de notre monde et qu'ils peuvent avoir des interactions avec les humains, comme la scène avec les cartons. C'est quelque chose qui nous intéressait beaucoup.

    TS: Les humains sont montrés comme des insectes, ils ne parlent pas, font des mouvements de bouche, on les traite comme de gros insectes au final (rires). Et puis on se demande à quel point les insectes ne sont pas conscients de notre univers, comme s'ils se disaient "attention il faut se faire discret, il ne faut pas qu'ils nous voient". On va d'ailleurs peut-être aller un peu plus loin si on fait le 3ème film...

    Un troisième film est-il prévu ?

    HG : En effet, on a d'ailleurs déjà écrit un traitement qui se déroule en Chine, on a commencé les repérages et on a une histoire. Maintenant on vient de finir Les Mandibules du bout du monde, on va se reposer et peut-être laisser passer un peu de temps.

    Ce qui est formidable avec Minuscule, c'est qu'il s'agit d'un univers qui nous permet d'explorer beaucoup de choses, c'est un monde très ouvert. Le fait que ce soit des insectes rend le film universel, tout le monde connait les mouches, les coccinelles,... Les thématiques abordées parlent à tout le monde et les références cinématographiques sont très grand public.  

     

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