Allociné : "Brillantissime" est votre premier film en tant que réalisatrice. Pourquoi maintenant et pourquoi cette histoire ?
Michèle Laroque : Franchement, j'aurai pu m'en passer mais, on m'en parlait depuis longtemps, il y avait pas mal de producteurs qui me disaient : "Allez, fais ton premier film !". Et je disais : "oui mais je peux tellement vivre sans et j'adore être actrice". Mais, j'adore le personnage d'Angela. J'avais envie de raconter cette histoire, que j'ai écrite avec Benjamin Morgaine et Lionel Dutemple, et donc je savais vraiment comment je voulais la raconter, j'ai mis vraiment des scènes avec mon humour vraiment très personnel. Ca n'est pas passé par autre chose, c'est vraiment en direct de mon cerveau. Je me suis dit qu'un autre réalisateur pourrait faire quelque chose de formidable, parce qu'on a tous des perceptions différentes, mais j'avais envie de raconter l'histoire exactement comme je l'avais écrite. Donc, je me suis lancée.
Ce n'est pas évident de se lancer car il ne faut pas être paresseux. C'est du travail (rires). Surtout que le rôle d'Angela est un rôle prédominant. Je me demandais comment ça allait se passer. Après, j'ai des amis qui ont joué et réalisé en même temps et qui m'ont rassurée. Ils m'ont dit que lorsqu'on était au milieu du plateau parce qu'on joue, finalement, on avait une vision des choses qui aidait beaucoup. Et c'est vrai. J'ai bien préparé en amont, comme ça, j'étais détendue.
Le film est basé sur la pièce anglaise "Mon Brillantissime divorce" que vous aviez déjà adaptée sur les planches. En quoi est-il différent ?
La pièce était un monologue où Angela racontait l'histoire. Dans la pièce, c'était un 14 juillet mais pas à Noël. Elle était larguée, puis, ça l'énervait parce que chaque fois qu'il y avait des 14 juillet, elle disait : "On dirait qu'on fête la rupture avec les feux d'artifice !" (rires) Et c'était plus sur le divorce, il y avait des histoires d'argent.. Et moi, ça ne m'intéressait pas du tout.
J'avais vraiment envie de parler des rapports affectifs, j'avais envie de parler d'une rupture. Et [d'une] qui [se déroule] un jour qui est tellement symbolique sur le plan familial, comme Noël. Je voulais montrer aussi comment d'une grosse épreuve où vraiment tout est détruit, tout ce qu'on a construit depuis des années est détruit, on peut s'en servir et comprendre quelque chose de soi et aller vers sa vraie vie. Parce qu'en fait, au départ, elle n'est pas dans sa vraie vie. Elle est dans un livre d'images, dans une vie que sa mère lui a un peu indiqué de suivre. Et comme elle a une mère, jouée par Françoise Fabian, écrasante d'autorité, de certitudes, de beauté aussi...
L'héroïne du film a des cordons à couper
Ce n'est sûrement pas facile pour une petite fille d'avoir une mère aussi belle et autoritaire. Il y avait des cordons à couper... Et cette grosse épreuve, on peut la vivre différemment. On peut se dire : "Olala, je suis une victime de la vie, ils m'ont tous laissée toute seule". Bon, elle ne comprend pas ce qui lui arrive, Angela. Mais, elle rebondit assez vite. Et après, ça lui sert à se comprendre, à se découvrir et, surtout, à s'aimer. Et c'est quand on s'aime qu'on peut vraiment voir ceux qui nous aiment et les aimer à notre tour.
C'est quelque chose de très basique qu'on sait tous et toutes. Mais, lorsqu'on vit à travers un personnage son histoire, ça nous fait du bien. Ca nous permet de le vivre à travers lui, ça donne des idées pour sa propre vie ou celle de ses proches. Je ressens ça en tout cas quand je regarde un film, quand je lis un livre ou quand j'écoute une chanson. Parfois, quand je suis prête à comprendre quelque chose, les paroles d'une chanson ou une citation, ça me permet de concrétiser ce que j'ai commencé à comprendre et de pouvoir le vivre. J'espère que ce film va servir à ça.
Il y a plusieurs caméos assez savoureux dans le film... Qu'est-ce qui vous a décidé ?
C'est mon premier long. J'avais envie qu'il y ait ma ville. Là où Angela habite, c'est l'immeuble où j'ai toujours habité enfant, à Nice. Jusqu'à mon départ pour Paris, j'ai habité là. Le square où l'on retrouve Gérard Darmon, le vendeur de fruits, c'est là où j'ai fait mes premiers pas. J'ai des copains d'enfance à tous les coins de rue dans le film. Personne ne peut le savoir parce que ce ne sont pas des comédiens... La boucherie, c'est celle du quartier (rires).
Et il y a mes amis chéris, qui sont des super comédiens, donc ça tombe bien. Kad Merad, j'ai fait son premier long-métrage [cf : Monsieur Papa], il fait le mien. Michael Youn, c'est un ami très cher, Palmade évidemment, la bande à Fifi aussi, Jean Benguigui, Marthe Villalonga. Des gens que j'aime, que j'admire, qui comptent pour moi. Evidemment, comme je suis comédienne, quand j'ai écrit le scénario, tous les personnages sont hyper importants pour moi. Il n'y pas de personnage insignifiant. Tout est vraiment important.
Le rapport affectif, il n'y a rien de plus intéressant
Ils m'ont tous dit oui, donc j'ai la chance d'avoir les meilleurs acteurs même pour des personnages qui sont parfois dans une seule scène. Ca m'a beaucoup aidée car ce sont des instruments extraordinaires pour un chef d'orchestre.
Votre mère et votre fille, qui joue d'ailleurs votre fille à l'écran, apparaissent aussi dans "Brillantissime" :
Oui et mon chien (rires) ! Ma fille avait été dans Comme t'y es belle, elle avait 10 ans, elle jouait ma fille. Je voulais absolument qu'elle soit dans mon premier long-métrage aussi. Comme j'ai mis du temps à l'écrire parce que j'avais plein d'autres trucs à faire, chaque fois, on changeait l'âge de ma fille parce qu'elle avait évolué (rires). Et elle l'a fait. Et là, ça y est, j'ai gagné, elle veut être actrice. Je suis super contente. Ce n'est pas que je voulais [qu'elle le soit] mais je suis tellement contente de l'être que j'ai l'impression que j'ai fait tout ça inconsciemment pour qu'elle le soit. Et [il y a aussi] ma mère, qui ne fait que rire dans le film. D'ailleurs, elle râle un peu parce qu'elle n'a pas eu de répliques ! Ils râlent tous... Non, non, vraiment, j'ai une famille très difficile (rires).
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