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    Ces projets de films de grands réalisateurs qui n'ont jamais vu le jour...
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Certains projets de films chez de grands réalisateurs n'ont malheureusement jamais pu être menés à leurs termes, pour diverses raisons. Voici cinq exemples; certains bien connus, d'autres moins.

    Kaléidoscope d'Alfred Hitchcock

    Après la sortie de Marnie qui fut un gros échec critique et commercial, Alfred Hitchcock dut se résoudre à tourner Le Rideau déchiré en 1966. Nouvelle déception et échec pour le réalisateur. Il travaille alors sur un nouveau projet de film, qu'il baptise Frenzy. Il ne s'agit pourtant nullement du film sorti sous le même titre en 1972, qui possède d'ailleurs sans doute la séquence de meurtre la plus sexuellement explicite de toute la filmographie du maître. D'abord connu sous le nom de Frenzy, le projet inachevé de Hitchcock s'intitule finalement Kaléidoscope. Un projet qui doit lui faire renouer avec le succès de Psychose et des Oiseaux.

    Dans son esprit, Kaleidoscope doit être un thriller d’un type nouveau, comportant des scènes sexuellement très explicites, tourné avec des comédiens inconnus pour un petit budget, dans des décors naturels, et dont la technique (pellicules rapides, caméra portée) s’inspire des films européens. A cette période,­ Hitchcock est alors fasciné par le travail de Michelangelo Antonioni sur son Blow up. A l'été 1967, des essais muets sont même filmés dans le plus grand secret, sous la direction du photographe Arthur Schatz. Personne ne doit savoir ce sur quoi travaille Hitchcock.

    Ci-dessous justement, un très court extrait de ces essais. Au total, une heure d'images seront retrouvées dans la maison du maître peu après son décès.

    Après avoir approché plusieurs scénaristes comme Robert Bloch (auteur du livre Psychose), Samuel Taylor et Alec Coppel, auteur du script de Sueurs froides, le réalisateur se tourne finalement vers son vieux complice Benn Levy, qui avait signé pour lui le scénario de Chantage en 1929.

    Pour bâtir son intrigue, Hitchcock cherche à s'inspirer de l’histoire (authentique cela va sans dire) de Neville Heath, un serial killer anglais qui se faisait prendre en pitié par des filles en leur racontant ses malheurs, avant de les violer puis de les tuer. Finalement, le script évolue vers l'histoire d'un jeune homme porté vers le body building (!), homosexuel refoulé, attirant les femmes vers des points d'eau pour les violer et les tuer. Le premier meurtre du film se déroule d'ailleurs dans le cadre d'une cascade en forêt.

    Ci-dessous, une photo de l'essai réalisé pour cette scène pour le tournage du futur film...

    Lorsque Hitchcock envoya une version de son script à François Truffaut, ce dernier lui répondit être très mal à l'aise avec le niveau de violence et de sexe que Hitchcock voulait voir dans sa future oeuvre : "cela ne m'inquiète pas trop parce que je sais que vous êtes capable de filmer de telles scènes avec une vraie tension dramatique, et que vous ne vous attardez jamais sur des détails insignifiants" lui écrit-il. Il n'empêche.

    L'un des Top executive de Universal, Lew Wasserman, pense l'inverse. Il jugeait le projet anti commercial, notamment en raison de sa violence sexuelle. Quant au casting du film, il ne devait être composé que de parfaits inconnus. "Ne faites pas ce film, vous allez foutre en l'air votre marque !" lanca-t-il à Hitchcock. Ce dernier céda et abandonna le projet. Wasserman le persuada alors d'entamer plutôt la production d'un autre projet, qui sera L'Etau.

    En guise d'épilogue, Hitchcock utilisera toute de même certains éléments développés dans son Kaléidoscope dans son futur film Frenzy, en 1972, qui est une adaptation d'une nouvelle d'Arthur La Bern intitulée Goodbye Piccadilly, Farewell Leicester Square. De manière assez ironique d'ailleurs, le tueur au coeur de cette nouvelle est fortement inspiré par Neville Heath, la même source d'inspiration que le tueur de Kaléidoscope.

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