AlloCiné : 5 ans après le premier volet, la famille que vous formez pour Les Tuche se retrouve, et on peut voir que les enfants ont grandi. On ressent un plaisir particulier et assez communicatif d'être réunis...
Jean-Paul Rouve (Jeff Tuche) : De se retrouver en tant qu’acteurs, c’est toujours un plaisir, et avec Isabelle [Nanty], on se connait depuis tellement longtemps. Donc ça c’est sûr, c’est un vrai plaisir de retravailler avec des acteurs qu’on aime.
Et en effet il y a une autre dimension ici, de retrouver des enfants 5 ans après, ça grandit, donc il y a un rapport humain inévitable, de les voir changer : 'qu’est-ce que tu as fait, où tu en es, qu’est-ce que tu veux faire ?…' On a un rapport de parents avec eux, parents même vis-à-vis du métier. Ce qu’ils ont envie de faire, de les conseiller... Tout se mélange un peu.
Isabelle Nanty (Cathy Tuche) : Ils sont bons. Théo [Fernandez] avait 11 ans, il en a maintenant 16. Il aurait pu être mauvais ! Ben non, en fait, il est super bon, il est même encore mieux. Pierre [Lottin] aussi. Sarah [Stern] est lumineuse, c’est une grande actrice. Faire ce qu’elle fait n’est pas évident, cette cruche qui n'est attachée qu’à des choses superficielles. Elle le joue avec beaucoup de profondeur et d’émotion. Donc c’était un plaisir de les retrouver comme acteurs. Et puis, Claire Nadeau, une foldingotte totale ! On ne s’ennuie pas avec Claire ! Puis le scénario avait été très bien écrit par l’ex équipe des Guignols. Et après, sur cette base-là, on est libre. On lui propose des choses, il les sublime. On a bien rigolé.
Est-ce qu'une suite était déjà dans l’air au moment du premier volet ?
Isabelle Nanty : Non, je n’ai pas l’impression. Le film a bien marché en salles, mais après il a continué une deuxième vie, clandestine, qui nous a échappé un peu. Les mômes se passaient le film, se le faisaient découvrir, ce qui fait que quand c’est passé la télé, ça a fait à peu près 9 millions. Et du coup, ils ont commandé le 2.
Olivier Baroux, réalisateur : On n'avait absolument pas idée de faire le 2 quand on a tourné le 1. C'est assez rare déjà d'imaginer une suite lorsqu'on tourne un film. C'est le public qui a décidé, en fait. Quand on a vu l’engouement, quand on a entendu les gens nous dire ‘je le regarde une fois par mois avec mes enfants, je connais les répliques par cœur’. Sur Internet, des gens s’amusent à faire des remix avec les meilleures répliques du film. Tout ça, ce sont des signes qui vous disent que les gens se sont complètement appropriés le film et ça devient un objet familial.
Lorsqu'on a eu le feu vert de la production, on s'est dit que le challenge était gros et qu'il ne fallait absolument pas décevoir les gens. Ne pas repartir sur le même genre d'histoire, trouver quelque chose d'original, de différent. On y a longtemps et beaucoup réfléchi. Et puis, on s'est lancés !
Pourquoi le rêve américain ?
Olivier Baroux : On a une image comme ça des Etats-Unis où tout est possible. On peut tout réussir là-bas. Ce discours a d'ailleurs été beaucoup véhiculé ces derniers mois avec la crise, tout ce qu'on a pu connaitre en France... L'Amérique en tant que pays des libertés. C'est un rêve, mais ça reste un rêve et ça peut devenir un cauchemar. On aimait bien l'idée que Jeff, qui n'a jamais travaillé de sa vie, se retrouve aux Etats-Unis, et soudain se mette à travailler quoi ! Devenir un grand patron. Que ça devienne un cauchemar, et que ça mette en péril une fois de plus la famille. C'est ça qu'il fallait défendre : ce n'est pas le risque de perdre de l'argent, ils risquent de tout perdre. Que la famille explose. Que les Tuche ne soient plus les Tuche.
Avez-vous été immédiatement emballé à l’idée du rêve américain, qui est une sorte de parallèle avec l'histoire de Monaco développée dans le premeir volet , avec ce côté un peu bling bling…
Jean-Paul Rouve : On passe à une culture qui est tellement différente de la nôtre. L’Amérique, ça fait toujours rêver, et en même temps, ils nous énervent. C’est assez marrant, c’est le mélange des deux.
Au début, je me souviens quand ils avaient eu l’idée, ils voulaient faire Les Tuche à Las Vegas. Ils ont finalement ouvert sur les Etats-Unis.
Isabelle Nanty : C’est par le biais de cette naïveté qu’ont Les Tuche, et l’enthousiasme aussi, qu’ils se fondent à ça et le vivent pleinement, et c’est par ça qu’on finit par trouver qu’il y a des choses futiles et superficielles. Eux, très vite, s’en rendent compte, et redécident de devenir des Tuche, c’est-à-dire des personnes qui s’aiment, qui ont le sens de la famille, de l’essentiel en fait, et pas du superficiel ou du matériel. Ils ne sont pas matériels du tout. Ils le sont sur des gadgets, des machins, parce qu’ils expérimentent comme des enfants. Mais en fait ils se rendent très vite compte qu’il y a de danger à ça. Ils sont assez sains.
Jean-Paul Rouve : Ils ont un bon sens.
Est-ce que vous diriez que les Tuche ont beaucoup changé depuis ce premier épisode ?
Olivier Baroux : Ils se sont habitués à vivre avec de l'argent. Ca n'a pas changé leur quotidien. On s'était aussi renseigné à l'époque des Tuche 1 sur l'attitude des gens qui gagnent beaucoup d'argent au Loto. On s'est aperçu dans les études qui ont été faites que finalement la plupart des gens ne changeaient absolument pas leurs habitudes. Peut être une plus grosse voiture. Peut être quelques aménagements dans la maison. Beaucoup de voyages. Et le reste est placé pour les générations futures. Je trouve ça assez dingue. Peu de gens claquent l'argent et deviennent dingues et vivent comme des nababs, même s'ils en ont les moyens. Donc, non, ils n'ont pas changé. Peut être un peu plus d'électro-ménager, une grande télé, un beau frigo, une nouvelle friteuse. Le jardin est propre. Ils s'achètent absolument ce qu'ils veulent, mais finalement ils ne dépensent pas trop.
Vous avez employé l'expression "générations futures". Il en est question justement avec ce film puisque vous retrouvez les enfants du premier volet...
Olivier Baroux : C'est assez exceptionnel, c'est aussi pour ça qu'on était excités à l'idée de faire le 2, de retrouver Théo qui a grandi. Cette idée de voir la famille qui a grandi me rend dingue. Et peut être qu'on fera un 3, on verra, mais pas tout de suite. Mais peut être que Théo aura encore grandi, ce sera un homme. Peut être que Stéphanie aura un enfant. Peut être que Mamie Suze ne sera plus là... Voilà, c'est dingue de se dire qu'on a peut être la chance de pouvoir encore faire une sorte de suivi avec cette famille. C'est très émouvant de s'imaginer ça.
Jean-Paul Rouve, c'est la première fois que vous jouez dans une suite. Est-ce que ça a changé pour vous la façon d’appréhender le projet ?
Jean-Paul Rouve : C’est très confortable pour tout vous dire. Quand vous faites un film, vous allez vraiment à l’inconnu, quand vous créez un personnage. Ce n’est pas facile au début. Là, vous arrivez, vous savez déjà comment la personne est. C’est comme si le plus gros du travail était fait.
Ca vous permet d’être plus libre dans votre interprétation. Un peu comme un musicien de jazz : quand il connait son morceau, connait ses gammes, il peut partir un peu où il veut. On peut faire ça, on est en liberté totale. Je n’ai pas fait assez de théâtre pour dire, un peu avec Les Robins, Isabelle en a fait plus que moi, je pense que c’est ça quand on joue une pièce de théâtre vraiment longtemps, on peut se permettre des variations et des grandes libertés. C’était vraiment en liberté, mais pas en roue libre, ce n’est pas pareil!
Les Tuche 2 - Le rêve américain : la bande-annonce
Propos recueillis au Festival de la comédie de l'Alpe d'Huez 2016