En matière d'exploitation vidéoludique de la licence du Seigneur des Anneaux, Warner Bros Games a un peu soufflé le chaud et le froid ces dernières années, où le bon comme Lord of The Ring Online (LOTRO pour les intimes) ou la déclinaison LEGO du "Seigneur des Anneaux" côtoyaient le moins bon mais correct (Lord of the Ring : la guerre du Nord), voir le catastrophique (Le Seigneur des Anneaux : la quête d'Aragorn).
Nouvelle itération autour de la franchise, le développement de La Terre du milieu - l'ombre du Mordor a été confié aux soins du studio Monolith Productions, propriété de Warner, et déjà derrière le jeu Les Gardiens de la Terre du milieu sorti en 2012.
Faisant partie des premiers titres qui ouvrent le bal de la traditionnelle saison automnale (et féroce) des grosses sorties vidéoludiques, La Terre du Milieu - l'ombre du Mordor a plusieurs atouts dans sa besace pour autant séduire le profane que l'amoureux transi de l'univers foisonnant et particulièrement riche de J.R.R. Tolkien, même si le titre de Monolith lui fait quelques entorses.
Le Troisième âge ou le retour de (l'increvable) Sauron
Se déroulant dans la période dite du Troisième âge, qui voit le retour de Sauron en Mordor, avant que n'éclate la Guerre de l'Anneau, L'ombre du Mordor propose une histoire plutôt originale et bienvenue, faisant assez habilement le lien entre la saga The Hobbit et la trilogie du Seigneur des Anneaux vues au cinéma.
Le jeu débute la nuit du retour de Sauron au Mordor, alors que l'armée de ce dernier exécute froidement les rôdeurs de la Porte Noire. Le joueur incarne Talion, un rôdeur assassiné, ainsi que les membres de sa famille, par la Main noire de Sauron. Coincé dans les Limbes, maudit, il est en quelque sorte ramené à la vie par un mystérieux Esprit. Un elfe en l'occurence, et pas n'importe qui...Littéralement habité par ce spectre, la quête du personnage devient une quête de vengeance pour retrouver ses assassins en portant des coups à l'armée de Sauron, mais pas seulement. Elle lui permettra aussi de percer les mystères sur les motivations et la personnalité de cet esprit qui lui impose sa volonté, tout en perçant le secret des origines des Anneaux de pouvoir.
Jeu d'action en monde ouvert, le titre de Monolith offre une histoire principale fragmentée en une vingtaine de missions, que le joueur parcourera à son rythme, sans compter les très nombreuses missions et quêtes secondaires -certaines indispensables d'ailleurs- et autres défis qui garnissent copieusement le jeu. Une durée de vie très conséquente et généreuse; largement de quoi nourrir plusieurs dizaines d'heures de jeu si on est perfectionniste et jusqu'au-boutiste pour retourner le jeu dans tous les sens.
Talion, agent officiel du chaos en Mordor
Le studio a beaucoup mis en avant -à juste titre d'ailleurs- l'ingénieux et jubilatoire concept du Nemesis System pour son jeu. Késako ? En fait, le monde dans lequel évolue Talion est évolutif. Par exemple si vous êtes vaincu par un adversaire plus coriace que vous (et cela risque d'arriver régulièrement, au moins au début du jeu), il prendra du galon dans l'armée de Sauron, bénéficiera de nouvelles compétences, et se souviendra de la manière dont vous l'avez combattu. Petit raffinement supplémentaire : il portera aussi les marques du précédent combat livré contre vous... Chaque ennemi possède sa propre personnalité et ses traits de caractère, son apparence, ses forces et ses faiblesses, le tout générés aléatoirement.
Grâce aux pouvoirs spectraux de Talion, qui se développeront d'ailleurs au fur et à mesure de l'aventure par le biais d'un arbre de talents judicieux et bien pensé, le joueur a ainsi la possibilité de multiplier les approches pour liquider les chefs de l'armée de Sauron. En analysant les forces et faiblesses de l'adversaire, il est possible de retourner les ennemis les uns contre les autres, les forcer à faire le sale boulot à votre place en assassinant un supérieur, provoquer en duel un rival...Tout est bon pour éclaircir les rangs de l'ennemi.
S'il est toujours possible de foncer dans le tas pour les adeptes de la technique du bulldozer, cela reste une méthode assez risquée. D'abord parce que certains affrontements avec les capitaines donneront pas mal de fil à retordre et qu'ils seront loin de se laisser faire, mais aussi parce que le héros peut très vite se retrouver submergé, avec l'arrivée massive de renforts.
Sous (bonnes) influences
L'une des premières choses qui sautaient aux yeux lors de la présentation du jeu à la Presse en janvier dernier étaient les évidentes influences de (gros) titres dans le Gameplay et la structure narrative de l'ombre du Mordor : la série des jeux Batman Arkham développée par le studio Rocksteady (autre studio de Warner) pour ce qui concerne les combats, même si ceux-ci sont infiniement plus brutaux dans l'ombre du Mordor. Et l'influence -sans doute encore plus grande- d'Assassin's Creed de l'éditeur Ubisoft, quitte à en épouser parfois les aspects répétitifs sur les actions à accomplir.
Si l'univers à parcourir ne brille pas forcément par sa diversité, que le jeu n'est pas exempt de tout reproche (l'I.A. des ennemis par exemple, un peu aux fraises, au contraire des capitaines), il se rachète par sa générosité, sa réalisation technique assez solide, et, peut-être le plus important, une vraie identité. Un excellent hors-d'oeuvre en attendant la sortie de The Hobbit : la bataille des cinq armées le 10 décembre prochain.