Parmi les nombreux films en avant-première dévoilés au Festival du film francophone d'Angoulême, qui a fermé ses portes il y a quelques jours, était notamment présenté pour la toute première fois, L'Affaire SK1, inspiré de l'affaire Guy Georges, porté par Raphael Personnaz et Nathalie Baye entre autres (sortie programmée le 7 janvier 2015).
Particularité : "L'Affaire SK1" est le premier long métrage de cinéma de Frédéric Tellier, qui a à son actif plusieurs fictions télé, parmi lesquelles la série remarquée Les Hommes de l'ombre.
Alors que France 2 s'apprête à dévoiler bientôt les premiers épisodes de la saison 2, Frédéric Tellier nous a indiqué qu'il ne sera pas au générique et s'en explique. L'occasion également de s'exprimer plus largement sur l'avenir de la fiction télé en France.
AlloCiné : La saison 2 des Hommes de l’ombre arrive bientôt. Savez-vous quand elle sera diffusée ?
Frédéric Tellier : Non. Je ne l’ai pas du tout tournée. D’abord, il y a eu un petit quiproquo ; on m’a demandé tard de venir dessus alors que j’avais fait la création. Il y a eu un petit truc pas forcément chic. Et puis, après quand on m’a contacté, j’étais parti sur autre chose, sur "L’affaire SK1". Les producteurs ont continué cette saison 2. Elle est effectivement tournée, terminée.
France 2
Il y a eu du mouvement côté casting, mais je ne savais pas que cela vous concernait également…
Nous sommes quatre créateurs de la série. Les deux producteurs, le scénariste Dan Franck, et moi-même. Mais ni Dan ni moi n’avons été conviés à la danse de la saison 2.
--> En savoir plus : Nathalie Baye quitte "Les Hommes de l'ombre" (article publié 20 février 2013)
Le parti pris -que je trouve passionnant- est d’avoir des gens de lumière. Nathalie Baye avait fait la première saison. spoiler: J’adore ce retournement de première saison : on pense qu’elle est élue, et bing ce n’est pas elle ! C’est l’homme de gauche qui est élu dans la saison 2, mais il y a quelqu’un qui vient le remplacer. Carole Bouquet joue la femme du président.
Moi, téléspectateur, j’adore ça, j’ai envie de voir la saison 2. Pour autant, je n’ai pas lu les scripts. On m’a envoyé les DVD de cette saison. Je vais les regarder, comme ça, par amitié. Mais je suis très loin de cette saison 2, un peu malheureusement –vous le comprendrez- dans mon cœur. Ce sont les choses de la vie, du business quoi.
D’autres projets côté séries ?
Pour le moment, je n’ai pas de projets précis ; je suis dans la sortie de "L’Affaire SK1". Et j’ai un autre projet de cinéma qui pointe le nez avec la même production que "L’Affaire SK1". J’adore les histoires vraies, et c’est à nouveau une histoire vraie qu’on va raconter.
Mais j’ai très envie de refaire de la télé, car je viens de là. C’est un média fabuleux. C’est un peu plus compliqué politiquement. C’est toujours un peu plus compliqué d’arriver à accoucher d’une série... Je ne sais pas très bien pourquoi encore.
Dans les autres pays, on a des familles de croque-morts, des nanas débridées sexuellement. On est très très loin de ça chez nous…
C’est "compliqué"… "Compliqué" plus spécifiquement du côté de France Télévisions où il y a eu une valse des dirigeants ces derniers temps ?
La télé est un média avec beaucoup de luttes de pouvoir, beaucoup de luttes internes qui ne l’aident pas forcément à s’épanouir. Mais je suis confiant.
Par ailleurs, je suis président du Groupe 25 Images, qui est l’association des réalisateurs de fiction télé. J’adore la télé, j’espère qu’elle va s’épanouir comme elle s’épanouit dans d’autres pays. Même si pour le moment, nous sommes le pays européen au dernier rang de la création de séries. Il va falloir qu’on se réveille. Mais on a un avenir fabuleux en télé. On a plein de choses à proposer.
J’exagère un peu, je vais faire bondir les gens de télé, mais en France, on a quand même que des polars et des drames familiaux ! Alors que dans les autres pays, on a des familles de croque-morts, des nanas débridées sexuellement. On est très très loin de ça chez nous… C’est à se demander pourquoi. Ce sont toujours un peu les mêmes séries qui reviennent.
Canal+ Droits Audiovisuels
Ça bouge, mais cela reste confiné à certaines chaînes. On peut penser par exemple à des séries comme Workingirls. Mais ces séries ne sont pas toujours accessibles à tous…
Ce ne sont pas des séries accessibles. Canal est une merveilleuse chaine de télé, mais qui se fatigue aussi à ne pas avoir de concurrence en face. On devrait en avoir. Vous parliez de France Télévisions à juste titre. France Télévisions devrait être irréprochable et mener la vie dure à tous les canaux privés en étant créatifs, puisque pas soumis à l’audience a priori. Etonnamment depuis que la pub n’est pas là, ils n’ont jamais autant parlé audiences à France Télévisions, ce qui n’est pas très compréhensible pour nous tous qui payons cette chaine avec nos impôts. On devrait avoir envie de faire des choses incroyables.
En Angleterre ou aux Etats-Unis, on fait des séries de science-fiction. On est très très loin d’avoir même l’idée, d’avoir l’audace de présenter un projet du genre à France Télévisions. Je ne comprends pas.
Un problème qui ressort souvent sont les délais de productions en France. Par exemple, Les Revenants... Lorsque sur AlloCiné, nous avons publié un article sur le synopsis de la saison 2, les internautes ont beaucoup commenté, s’étonnant de ce délai…
Si on avait déjà l’audace de création, et qu’on n’avait plus que ce problème de volume de production, je pense qu’on serait déjà libéré de quelque chose. Vous vous rendez compte, nous sommes en 2014, et nous avons eu une série sur le paranormal de toute l’histoire de la télé. Je pense qu’il faut que ça s’ouvre, que ça se libère, que ça se décomplexe un peu et qu’il y ait de l’audace.
Il faut que la télé s'affole un peu
L'audace manque beaucoup en télé, même s’il y a de très bonnes séries. J’adore la télévision, tout autant que le cinéma pour des raisons différentes. Ce sont des médias complémentaires, mails il faut que la télé s’affole un peu.
Vous évoquiez un nouveau projet cinéma inspiré d’une histoire vraie. Est-il encore trop tôt pour nous dire le sujet dont vous allez vous inspirer ?
Non, nous sommes en plein début d’écriture. Comme c’est une affaire très complexe, ça fait 2 ans que nous travaillons sur la documentation. C’est un film à charge contre les pesticides et les OGM, sur cette espèce de mafia et d’omerta sur cet empoisonnement planétaire qu’on est en train de subir.
Partez-vous d’un cas particulier ou de plusieurs affaires ?
On s’inspire de pas mal de choses pour créer une histoire un peu plus fictionnelle que "L’Affaire SK1". Ce sera basé sur plein d’histoires que nous recoupons, de gens que nous avons rencontré. L’étincelle de départ a été un constat de voir la recrudescence des cancers chez les agriculteurs.
Propos recueillis au Festival du film francophone d'Angoulême
La bande-annonce des "Hommes de l'ombre" saison 1 :
