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    Olivier Marchal sur tous les fronts ! [INTERVIEW]
    Clément Cuyer
    Clément Cuyer
    -Journaliste
    Clément Cuyer apprécie tous les genres, du bon film d’horreur qui tâche à la comédie potache. Il est un "vieux de la vieille" d’AlloCiné, journaliste au sein de la Rédaction depuis maintenant plus de deux décennies passionnées. "Trop vieux pour ces conneries" ? Ô grand jamais !

    Rencontre avec l'acteur/réalisateur Olivier Marchal, qui évoque pour AlloCiné ses nombreux projets, ses souvenirs de cinéaste, son amour du polar, ses années de flic,...

    Ben Dauchez

    En 2014, AlloCiné avait rencontré l'acteur, scénariste et réalisateur Olivier Marchal pour un entretien où il évoquait ses prochaines échéances. Au final, la série Section Zéro a vu le jour, Paradise Beach sortira en salles en février prochain sans qu'on sache s'il est finalement crédité au générique, et son film Notre mère la guerre est en stand-by.

    Mais cette interview était également l'occasion pour Olivier Marchal de revenir sur ses plus grands souvenirs de cinéaste, son amour du polar et, bien sûr, ses années de flic. Retour sur cet entretien alors qu'il fête aujourd'hui ses 60 ans.

    AlloCiné : Tout d'abord, comment allez-vous ?

    Olivier Marchal : L'année 2013 a été particulièrement sombre pour moi, dans tous les compartiments de ma vie. Il y a eu une grosse remise en question professionnelle. Je me suis un peu retiré pour retrouver le goût d'écrire. Et je l'ai retrouvé à travers Borderline, un unitaire prestige pour France 2. J'ai besoin d'un facteur humain pour écrire. Ma rencontre avec Christophe Gavat, le bras droit de Michel Neyret, m'a tellement ému que j'ai écrit le scénario en trois mois. Le film, inspiré du livre 96 heures de Gavat, sera centré sur la garde à vue de ce dernier et pas sur l'affaire Neyret. Pour 2,5 millions d'euros, on a fait un unitaire prestige d'1h40 pour la télévision qui est super touchant et qui me ressemble plus que tout ce que j'ai fait depuis deux ans.

    Cinq ans après "Braquo", vous allez également signer une nouvelle série...

    Ca fait deux ans que j'écris une série d'anticipation, Section Zéro, soutenue par EuropaCorp et Luc Besson. La série se tourne en octobre. C'est une sorte de mélange entre, toutes comparaisons gardées, Mad Max, Les Fils de l'homme, Looper, Soleil vert, Blade Runner... L'histoire de flics, dans la Grande Europe, qui se réunissent en underground pour rétablir la démocratie et affronter les groupes financiers qui ont pris le pouvoir. J'écris et réalise les quatre premiers épisodes. Xavier Durringer écrit les quatre autres avec David Fernandez. Ca coûte cher, il y a beaucoup d'action. C'est très violent, très noir, mais avec aussi beaucoup d'émotion.

    Et côté cinéma ?

    En 2015, je tournerai Notre mère la guerre, un film sur les poilus pendant la guerre 14-18, l'adaptation de la BD, une histoire sublime sur la quête de vérité d'un jeune poilu à travers toute la guerre, avec aussi une très belle histoire d'amour. Une grosse épopée. Et puis, pour plus tard, j'ai aussi adapté un scénario de Xavier Durringer qui s'appelle Paradise Beach. Un film de voyous en Thaïlande, mais jugé trop noir, trop violent aujourd'hui. Donc pour le moment, on laisse tomber, je vais le faire traduire en anglais pour le proposer à Harvey Weinstein qui veut bosser avec moi, pour le faire avec des acteurs américains.

    Ben Dauchez

    Quel est votre meilleur souvenir en tant que réalisateur ?

    En tant que réalisateur, le souvenir le plus fort, c'est 36 Quai des Orfèvres. C'était mon deuxième film, fait dans une insouciance absolue. Soit ça passait, soit ma carrière était finie. Personne ne croyait au casting... Dans le milieu du cinéma français, j'ai des copains qui me disait  : "Y'a des mecs qui parient dans les restos que tu vas te vautrer !" Au final, on a fait 2,5 millions d'entrées. Moi, je peux vous dire que quand on a Auteuil et Depardieu sur un plateau... Le jour où je les ai eu tous les deux dans le cadre, j'ai eu une montée... J'ai les deux qui sont là, quoi ! (rires)

    Et mon expérience la plus forte, je crois que c'est MR73. C'est mon film de metteur en scène, c'est ce que j'ai en moi, c'est l'histoire dont j'avais envie de parler, c'est quelque chose qui m'a bouleversé, qui m'a marqué. Ce film, je peux le revoir, alors que les autres, non. Je ne renie pas 36 Quai des Orfèvres, c'est un sublime souvenir, le sujet est super, j'ai bossé comme un fou sur le scénario, et puis il y a eu un gros succès qui m'a permis de continuer à bosser. Mais il y a des maladresses. Mon meilleur film, c'est MR 73.

    Un mot sur "Truands", qui a reçu de violentes critiques au moment de sa sortie...

    Nous, avec Benoît Magimel, on s'en sort pas trop mals. Mais j'en étais gêné pour Frédéric Schoendoerffer. Et puis c'est surtout Philippe Caubère qui s'en est pris plein la gueule. Magimel et moi, on était le tandem un peu plus sympa, on la jouait plus humains, en montrant qu'il y avait des voyous moins fous que les autres. Mais avec ce film, je suis devenu l'égérie des mecs de banlieue, c'était la consécration ! Ils m'appellent dans la rue : "Hé, Jean-Guy ! La scène à poil dans le hamamm !" Bon... (rires)

    Vous sentez-vous un peu en marge dans le cinéma français ?

    Un peu oui. Aux César, avec Christophe Baratier, pour Les Choristes, on avait fait 12 millions d'entrées à nous deux, et on sentait que personne nous calculait. Oui, là, j'ai senti que j'étais en marge. Mais c'est pas grave. A partir du moment où mes producteurs me considèrent et où Gaumont me fait confiance, ça va. J'ai une colère en moi qui permet d'avancer. Mais ce n'est pas de l'aigreur. Le jour où je serai aigri ou fatigué, j'arrêterai.

    Ben Dauchez

    Vous êtes l'un des fers de lance du polar en France. Qu'est-ce qui fascine les gens dans ce genre selon vous ?

    Le polar fascine car c'est un genre où tu peux toujours dépasser les limites. L'homme est capable d'aller très loin dans la cruauté et la barbarie, et il n'y a que dans le polar que tu peux traiter les tragédies à une très grande échelle. Tu peux te permettre d'aller très loin dans les personnages, j'ai appris ça en regardant des séries comme 24 heures, The Shield... Quand j'écris la saison 1 de Braquo, c'est que je suis en révolte contre le système. Pendant l'écriture, chaque jour, je me matais deux ou trois épisodes de The Shield, ça me donnait la pêche. Il faut savoir oser sans tomber dans le caricatural ou le grotesque.

    C'est le cinéma qui vous a donné envie de devenir flic ?

    Le cinéma et les romans. L'envie d'être un héros. Je lisais Raymond Chandler, James Ellroy, tous les Manchette... Le cinéma, c'était Delon, Gabin, Ventura, Eastwood, McQueen, Bronson... Je voulais ressembler à ces gars-là. Ils ont un gun, des belles bagnoles et tirent des belles gonzesses ! (rires) C'est basique comme truc, c'est gamin, enfantin. Ensuite, la vie m'a chargé de découvrir le reste, mais au départ, l'envie de devenir flic, c'est ludique, c'est une démarche très romantique, et profonde aussi. L'envie de rendre service aux gens, de rendre service à la société.

    Avez-vous la nostalgie de vos années de flic ?

    Ca ne me manque pas, mais j'ai la nostalgie de ce que j'ai vécu quand je suis arrivé à Paris et que je me suis retrouvé avec ces vieux flics... J'ai eu la chance d'être poulet dans les années 80. Les boîtes, la nuit, les fêtes, des supers affaires, on était une vraie tribu, une vraie famille. Franchement, tu ne prends même pas de notes, t'enregistres tout. Tu bosses avec des Corses, des Marseillais, des titis parisiens, des mecs de Belleville, y'avait plein de codes de langage... C'est la vraie école de la vie, qu'on a perdu aujourd'hui. Avec eux, je me suis prouvé des choses par rapport au courage. J'ai été mal dans ma peau pendant longtemps, et c'est un métier qui m'a permis de m'assumer en tant qu'homme, de me rassurer. Ca m'a amené des choses très noires, très glauques, mais aussi des choses formidables.

    Propos recueillis par Clément Cuyer

    La bande-annonce de "MR 73", qu'Olivier Marchal décrit comme son meilleur film :

     

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