Adèle Exarchopoulos dans "La Vie d'Adèle" d'Abdellatif Kechiche © Wild Bunch Distribution
En 2014, le cinéma français dépoussière les César... Les 4 films à avoir récolté le plus de nominations brandissent leur liberté, affichant fièrement leurs héros subversifs. Le grand favori - 10 trophées potentiels - est aussi le plus gonflé...
Dans "Les Garçons et Guillaume, à table !", Guillaume Gallienne se met lui-même en scène dans son propre rôle (classique !) mais aussi dans le rôle de sa mère (beaucoup moins classique !). Une double performance stupéfiante qui aurait pu valoir au comédien une double nomination, comme Meilleur Acteur et comme Meilleure Actrice. Chez Gallienne, la subversion est douce, jamais gênante ou glauque, parfois bouleversante, toujours élégante. Masculin et féminin, l'homme est ici ambiguïté.
Autre subversion, La Vénus à la fourrure - 7 nominations -, où Roman Polanski bouleverse les règles, brouille les repères et inverse le rapport de force. Rien de surprenant pour qui est familier de son cinéma. Qu'on se souvienne du Locataire, qui voyait le héros (Polanski soi-même) se travestir, en pleine confusion des genres. Ou encore de Lunes de fiel, où Emmanuelle Seigner (déjà !) mettait à mal la virilité de son partenaire. Dans "La Vénus à la fourrure", le pouvoir change une nouvelle fois de mains... mais dans un immense éclat de rire. Une subversion sur le mode de la farce donc.
Nommé à 8 reprises, La Vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche aborde le désir et la passion absolue entre deux femmes avec une liberté, une évidence et une sensualité hors du commun. Sa force subversive ? S'imposer comme une oeuvre choc qui justement ne choque pas, montrer le trouble et la lutte des sentiments sans militantisme, oser le sexe cru sans voyeurisme. Son acmé ? Une inoubliable scène d'amour homosexuelle, très longue et très explicite. On ne peut plus troublante et esthétique.
C'est de façon encore plus frontale mais tout aussi naturelle qu'Alain Guiraudie met en scène le désir homosexuel, cette fois entre deux hommes davantage en quête de plaisir physique que d'amour. Passion dangereuse dans un lieu destiné exclusivement à la drague, L' inconnu du lac (interdit aux moins de 16 ans et huit fois nommé aux César) expose les corps nus et le sexe cru lors de scènes non simulées doublées. Sans envie de provoquer mais tout de même avec ce soupçon de subversion qui pointe l’utopie d’un Eden innocent et les dangers de l’excès de liberté …
4 films et autant de façon de revisiter la confusion des sens et des genres, sans a priori et sans stigmatisme, ouvertement et librement.
Laetitia Ratane et Vincent Garnier
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