AlloCine : Vous semblez avoir développé une relation très complice avec vos camarades de jeu de "Blue Bloods". Peut-on parler d'une relation quasi-familiale dans laquelle Tom Selleck représenterait le père et Will votre frère ?
Donnie Wahlberg : Cela prouve à quel point la phase du casting est primordiale. Bridget Moynahan (ndlr: qui joue Erin, la soeur de Danny dans la série) et moi avons une relation fantastique, fondée sur la même confiance qui peut parfois se développer entre un frère et une soeur. Nous sommes tous les deux des parents célibataires, nous parlons de pleins de choses une fois la caméra éteinte, ce qui alimente notre relation face à la caméra. Quand je regarde Will (ndlr : Will Estes, qui joue Jamie, le frère de Danny), j'ai l'impression de me voir il y a 10 ans, dans Boomtown. Je le vois appréhender certains éléments de son personnage comme je le faisais à cette période. Quant à Tom Selleck (ndlr : l'interprète de Frank, le père de Danny, Erin et Jamie), il est une figure paternelle pour tout le monde. Il a bien senti que j'étais parfois un peu agité, mais il a aussi vu et sait désormais que je suis très pro, c'est un peu comme Frank vis-à-vis de Danny au final.
La série a un point de vue différent sur les policiers que les autres "cop shows". On ressent davantage de respect envers les flics, une forme d'hommage respectueux aux forces de l'ordre. Comment voyiez-vous les flics lorsque vous étiez jeune ? Quelle était votre vision de la police étant adolescent ?
J'ai grandi à Boston et, dans ma jeunesse, je connaissais tous les flics du quartier. Ils avaient tous arrêté au moins un de mes frères ! Dans une ville comme Boston, les enfants deviennent soit des criminels, soit des flics. Je ne les ai jamais détestés. Par contre je n'ai jamais supporté d'en avoir un derrière moi sur l'autoroute. Dans ces cas-là, j'ai toujours l'impression d'avoir braqué une banque, même si je n'ai rien fait. Je ne sais pas pourquoi je ressens ça d'ailleurs. Je ne m'y habituerai jamais. Au fil des années, j'ai travaillé avec tellement de flics, que mon respect envers eux n'a cessé de grandir. Comme partout, il y en a toujours qui contournent les règles, et il peut arriver que certains fassent des choses répréhensibles, mais 99% d'entre eux, femmes ou hommes, font du mieux qu'ils peuvent, dans des circonstances parfois simplement effrayantes et dangereuses. Parfois ça se joue à rien. Parfois ils sont obligés de prendre de graves décisions en une seconde. Très rarement, ça se passe mal. Mais ils sont encore plus rarement reconnus pour ce qu'ils font de bien. Personnellement, avoir la possibilité d'explorer cet aspect-là est extraordinaire. Mon personnage prend parfois de mauvaises décisions, mais je sais que beaucoup de flics qui regardent la série respectent Danny parce qu'ils savent ce que c'est et ce qu'il doit affronter, mieux que quiconque.
La relation entre Danny et sa partenaire, jouée par Jennifer Esposito, fonctionne parce que c'est un jeu de contrastes entre eux...
En effet, j'ai l'habitude de dire à Will Estes (ndlr: qui interprète Jamie, le frère de Danny) que lui et moi avons de la chance d'avoir Nick Turturro et Jennifer Esposito comme partenaires. Ce sont de formidables comédiens qui donnent beaucoup et qui permettent de créer encore plus.
Qu'est-ce que ça fait de tourner réellement à New York, et non pas en studio à Hollywood ou au Canada, qui sert parfois de décor naturel pour New York ?
Je viens de tourner une scène dans un immeuble datant de 1885, il me semble. Je regarde par la fenêtre j'aperçois le pont de Williamsburg, une fraîche brise s'échappe de la fenêtre et... je réalise à quel point j'ai de la chance. Dans l'épisode intitulé "Tueur de flic" (ndlr : Saison 1, épisode 4), nous avons tourné une des scènes les plus importantes sous le pont de Brooklyn ! Entre chaque prise, j'entendais les ouvriers qui travaillaient au-dessus me crier des trucs comme "Hey Donnie, on t'adore mec !" C'était incroyable. Jouer un flic de New York à New York avec des habitants de New York est incomparable. Et c'est ce que nous vivons tous les jours. Tourner dans ces rues est quelque chose de fantastique.
Qu'est-ce que vous préférez dans le fait de jouer Danny ?
La liberté qu'il me laisse. J'aime quand le scénario me rappelle à quel point je peux être libre de jouer et d'essayer quelque chose de différent chaque jour. Mes journées de tournage préférées sont celles où, même si je suis guidé par le scénario, il est toujours possible de faire des découvertes ou de tenter des choses complètement imprévues. Aujourd'hui, par exemple, j'ai tenté sur une scène une variation "à la" Columbo ! C'était super agréable... et cela ne sonnait pas faux. J'ai eu quelques opportunités ici et là de jouer dans d'autres séries, de faire d'autres choses, mais j'ai tout de suite été attiré par ce rôle parce que, outre le fait que j'aime mes collègues, que je suis un fan de Tom et que le scénario était bon, Danny me permettait d'explorer et d'essayer des choses en tant qu'acteur.
Donnie Wahlberg, Bridget Moynahan, Tom Selleck & Will Estes
©CBS Television Studios
Selon vous, pourquoi "Blue Bloods" se distingue des autres séries policières ?
Les personnages de la série ont des points de vue divergents sur les affaires, le show offre ainsi un large spectre de visions sur les événements, et le téléspectateur peut ainsi lui aussi se faire sa propre opinion. Voilà selon moi ce qui rend Blue Bloods unique. Bien entendu je pourrais également dire que mes collègues sont fabuleux, que le scénario est génial et que j'y joue un personnage jusque-là inédit de ma filmographie, avec des variations hallucinantes selon les circonstances. Je peux explorer les différentes facettes de la personnalité de Danny. Je pense aussi à la dimension familiale de la série, et qui a son impact sur le public bien évidemment. Lorsque j'ai lu le scriot, je me rappelle que je pouvais quasiment imaginer ma soeur à l'autre bout de la table. D'ailleurs quelques engueulades que mon personnage a avec sa soeur interprétée par Bridget ressemblent beaucoup à celles que j'ai pu avoir avec ma propre soeur dans la vraie vie ! Quand quelque chose résonne de manière aussi véridique dans votre coeur, cela crée quelque chose dans votre tête, et en tant qu'acteur, cela donne envie de se plonger dans l'aventure. Quand on a tourné cette première scène de dîner, je savais que j'allais m'amuser en tournant les suivantes. Je savais que ces scènes allaient être vivantes, animées. Tourner dans une série est éreintant, on travaille 15 heures par jour, cinq jours par semaine. Je ne pourrais pas le faire si le projet ne vibrait pas et s'il ne m'apportait pas un peu de vie. Danny me procure beaucoup de liberté, ça me rend vivant. Les scènes familiales sont très sincères, cela me rend vivant. Se sentir "vivant" cinq jours par semaine en faisant de la télévision, c'est un cadeau. C'est inestimable de ressentir une telle énergie.
Avez-vous fait quelques recherches pour ce rôle ? Avez-vous passé du temps avec les flics de New York ?
Oui en effet j'ai passé un peu de temps avec eux. En fait j'avais déjà fait quelques stages chez eux pour des projets précédents, par exemple pour la mini-série Kill Point : dans la ligne de mire. Mais Danny n'est pas qu'un flic, c'est aussi le fils d'un homme très puissant de New York, et c'est cette facette que je voulais davantage explorer, que je voulais découvrir un peu plus à chaque épisode. Avec la liberté que l'on nous donne, une même scène peut être joué de plusieurs manières. Et lorsque Danny est face à son père, Frank (ndlr : joué par Tom Selleck), je me dois de réfléchir et de me préparer en me demandant ce que cela fait d'être le fils d'un homme aussi puissant et de prendre sa suite, tout en essayant de suivre son propre chemin. Danny doit probablement avoir un peu de ressentiment vis-à-vis de son père. Mais cela doit être mêlé aussi à de la gratitude. Je suis certain que parfois il profite de sa relation avec son père et que parfois cette relation est une entrave. C'est à la fois un privilège et un fardeau. C'est cette relation et toutes les dimensions qu'elle contient que j'ai voulu explorer. Je voulais tenter plusieurs choses et partir dans plusieurs directions parce que, dans la réalité, il n'y a pas qu'une seule explication ou qu'une seule façon de voir les choses. Danny n'est pas qu'un gars qui en veut à son père ou qu'un gars qui est en adoration devant son papa. C'est un personnage qui évolue entre ces deux extrêmes. Et chaque scénario, chaque scène me permet de naviguer dans ces eaux, d'explorer, de jouer selon une tonalité différente.
Quels sont les points communs que vous avez avec Danny ?
Je tournais une scène tout à l'heure et je me suis aperçu que je trouvais Danny trop froid et que j'avais tendance à le rendre plus humain à chaque prise. J'ai dû m'arrêter pour comprendre que, dans le contexte dans lequel Danny se trouve à cet instant, il doit être "insensible", et que je n'étais pas en cause. Danny oui. Je ne joue pas Donnie Wahlberg, je joue Danny Reagan. Le premier point commun que je nous trouve est... la malice. Je me souviens d'une scène entre Danny et son père, durant laquelle le fils se moque gentiment de son papa, il le provoque un peu... et ça me ressemble beaucoup. J'aime aussi être un leader dans la vie, j'ai toujours aimé cette position dans ma carrière, dans les rôles que j'ai joués. Mais il m'est arrivé, et il m'arrive encore, d'avoir à faire face à des leaders qui ont un peu pus d'autorité que moi, et c'est un point commun très fort entre Danny et moi. C'est intéressant à explorer et ça peut être électrique. C'est ce qui fait un peu la relation entre Danny et Frank, son père. Mais derrière la caméra, j'apprécie vraiment le fait de pouvoir passer du temps avec Tom, c'est incroyable, et c'est ce qui rend ce job si fantastique. C'est génial de venir au bureau en se disant qu'on va travailler avec Tom et réfléchir aux scènes, aux dialogues, à comment faire tout fonctionner. C'est génial aussi d'apprendre à le connaitre. Nous avons beaucoup de respect l'un pour l'autre et, comme dans la série, il y a une différence, d'expérience, d'âge, et ces différences nous servent pour nos personnages et dans la série d'ailleurs. Et c'est extraordinaire d'utiliser cela et d'explorer.
Vous parliez de votre admiration pour Tom Selleck plus tôt. Vous étiez fan de "Magnum" ? L'aviez-vous déjà rencontré avant ?
Je ne l'avais jamais rencontré avant Blue Bloods et oui, j'étais un fan de... Trois hommes et un bébé (ndlr: le remake américain de Trois hommes et un couffin). Ma mère était une immense fan de Magnum ! Elle est aux anges aujourd'hui ! Elle regarde Blue Bloods chaque vendredi, et je peux l'appeler dans la nuit pour lui demander son avis sur l'épisode pour l'entendre me dire : "Oh mon Dieu, j'ai adoré quand tu as fait rire Tom !" Elle est aux anges, je vous dis ! Bien entendu je me rappelle de Magnum mais je dois surtout vous avouer que Trois hommes et un bébé a fait partie de mes films préférés pendant longtemps. Au fil des années, à travers ses rôles, les interviews qu'il a données, mon respect pour lui n'a fait que grandir. Et aujourd'hui, en le connaissant, mon respect est sans limites. Le voir où il en est aujourd'hui, tout ce qu'il a accompli, ressentir la grâce qu'il diffuse sur le plateau, c'est quelque chose que je chéris au plus haut point et que j'aspire à connaître un jour. C'est une chose de connaître le succès, c'en est une autre, et c'est beaucoup plus compliqué, de conserver cette humilité suite à ce succès. Et c'est ce qui m'impressionne le plus chez lui. Il est une source d'inspiration pour moi.
Propos recueillis par Emmanuel Itier
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La saison 1 de Blue Bloods s'achève ce jeudi 29 mars sur M6. Découvrez ci-dessous les premières images de la saison 2, à découvrir prochainement :
Blue Bloods