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De quoi ça parle ?
[Pour sa partie centrale :] Jack grandit entre un père autoritaire et une mère aimante, qui lui donne foi en la vie. La naissance de ses deux frères l'oblige bientôt à partager cet amour inconditionnel, alors qu'il affronte l'esprit de compétition forcené d'un père obsédé par la réussite de ses enfants...
Le réalisateur
On ne présente pas Terrence Malick. D'abord, parce que ses (rares) films sont déjà entrés au panthéon du cinéma mondial ; ensuite parce qu'on ne présente pas quelqu'un que l'on ne connaît pas. L'homme-mystère et légendaire réalisateur aux cinq (bientôt six) films en presque quarante ans a remporté en 1979 le Prix de la mise en scène du Festival de Cannes pour Les Moissons du ciel, avant son éclipse de deux décennies. Son absence sur la Croisette le rend d'autant plus omniprésent, selon le (divin) principe de l'auteur formulé par Flaubert : "présent partout, visible nulle part". Pour en savoir plus, voir notre dossier.
Que retenir ?
Continuité et évolution. Terrence Malick poursuit son œuvre, et prend de plus en plus de risques : quand on choisit ainsi le parti de la beauté, de l’amour et cette forme sublime de naïveté (au sens ancien et noble), on s’expose forcément à la moquerie des cyniques, sachant que la confrérie des critiques assemblés à Cannes en compte un joli nombre – bien ingénus parfois dans leur cynisme. C’était le cas pour Le Nouveau monde, taxé par certains de mièvrerie, et cela le sera plus encore pour ce Tree of Life d’un lyrisme et d’une ambition folles, qui narre dans sa longue partie centrale une enfance entre père et mère, mais aussi entre deux principes éternels (ou plutôt le principe d’une dualité fondamentale), cœur du film encadré par deux poèmes ("Création/Genèse" et "Fin des temps/du monde", disons), des passages par l’ère moderne (pour la première fois Malick filme l’époque contemporaine, sans décalage même léger dans le passé) ou par une époque intermédiaire, à laquelle survient la tragédie humaine qui surplombe cette partie centrale. Complexe dans sa construction, avec son entrelacement de temporalités et ses associations d'images poétiques, sensorielles, The Tree of Life est pourtant d'une fluidité exceptionnelle, miraculeuse.
Arbres tamisant la lumière, contre-plongées, élément liquide et Nature... Les fondamentaux sont bien là, mais la caméra se fait cette fois plus mobile, le montage plus rapide, plus elliptique et allusif encore qu’à l’accoutumée (d’autant que le tempo de l’histoire reste lent). Comme toujours le film se structure de façon littéraire (faulknérienne) autour de monologues intérieurs et évite d’autant les dialogues, livrés avec parcimonie – chaque mot compte. On est bien au-delà du tombeau, de l'adresse ou de l’élégie, dans le chant, d’un bout à l’autre immergés dans une forme de spiritualité plus totale que jamais, et qu’on aurait tort de juger plus intrinsèquement chrétienne au prétexte que le Livre de Job est cité en exergue. Malick le mystique évolue : s’il se hisse toujours à l’universel, s’exposant comme aucun autre n’ose le faire, il le fait ici sur un mode différent, offrant un accès toujours plus généreux à l’émotion, établissant toujours plus de ponts (comme le rappelle l’image finale), entre deux rives, entre l’univers/l’individu à sa naissance et à sa mort, entre deux échelles de compréhension de l'existence, de la division cellulaire au cosmos, entre vivants et disparus - et ce pont-là s'appelle le deuil. Son esthétique tient de la "correspondance" - qu'elle soit glissement ou élévation - et repose sur le balancement que cette dernière ou la distance à parcourir entre deux principes antagonistes induisent, tel celui de cet enfant évoluant entre loi naturelle et grâce. Son cinéma s'incarne en un mot, "vie".
On le sait, contrairement à une majorité d'artistes de son temps (et sans qu'on puisse le qualifier d'optimiste), Malick n’est pas un chantre du désespoir. Certains se gaussent déjà des dinosaures qu'on aperçoit dans le film, ou s'agacent de cette ambition qui déploie sans fausse pudeur poésie ésotérique, vastes références et révélation d'une présence divine ? Pourquoi pas, il est facile (et légitime) de parodier un tel cinéaste, et l'on a le droit de rester perplexe. On imagine cependant que l'homme n’est pas moins désabusé que les plus blasés des critiques concernant les choses du monde, mais il est passé bien au-delà du cynisme (ce confort) ; le film le dit, la grâce sera moquée – mais elle ne répondra rien.
LES scènes
Histoire d’en contredire quelques-uns, les deux longs poèmes cosmico-théologiques.
Anecdote cannoise...
Pour la seconde fois depuis l’ouverture (après Minuit à Paris), le mot "rhinocéros" a été prononcé dans un film de la sélection officielle.
En bref...
The Tree of Life – Sortie le 17 mai 2011
Sélection officielle – En compétition (voir la sélection complète)
Réalisé par Terrence Malick – Avec Brad Pitt, Jessica Chastain, Sean Penn…
Tout sur le film
La bande-annonce
Alexis Geng