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    Un nouveau camouflet européen pour la loi HADOPI ?

    Le Parlement européen adopte à nouveau et à une écrasante unanimité l'amendement 138 du "paquet télécom", qui refuse d'autoriser les coupures d'internet sans décision de justice préalable.

    Nouvelle claque du Parlement européen au projet de loi HADOPI, ou nouveau coup d'épée dans l'eau pour les opposants au texte ? Le débat est moins que jamais en passe d'être enterré, alors même que les acteurs pro ou anti HADOPI battent le rappel de leurs troupes respectives. Mercredi, l'amendement 138 du "paquet télécom" a été adopté à nouveau par une très large majorité : 407 voix pour, 57 contre et 171 abstentions.

    Rappel des faits

    A l'origine, le paquet télécom est un ensemble de réformes pour la modernisation des communications électroniques. Toutefois, il n'y est pas question de contenus. Courant 2008, des articles relatifs au droit d'auteur viennent s'y greffer. Les députés européens Guy Bono, Daniel Cohn-Bendit et Zuzana Roithová déposent l'amendement 138, qui stipule qu'"aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans décision préalable de l'autorité judiciaire". Un texte qui s'oppose au projet de loi français "Création & Internet", et son autorité administrative, l'HADOPI. En septembre 2008, le texte est adopté par 88 % des eurodéputés. Le ministère de la Culture avait alors relativisé la portée de l'amendement, en se demandant si "la suspension d'internet est vraiment une restriction d'une liberté fondamentale" (VOIR NOTRE ARTICLE). En novembre, sur la pression du gouvernement français, le Conseil européen des ministres télécoms rejette pourtant le texte.

    Mars 2009 : l'amendement est réintroduit et revoté en commission. Toutefois, le texte ne fait pas l'unanimité au sein du Conseil de l'Union européenne. Le 28 avril, un compromis est finalement trouvé; mais il est jugé trop ambiguë. Les députés Verts et Libéraux décident de redéposer le texte original. Les deux textes devaient donc être présentés hier, pour la seconde lecture du paquet télécom par le Parlement européen. Lundi 4 mai, nouveau rebondissement. Il est décidé une "exclusivité mutuelle", "c'est-à-dire que si le compromis est voté, le texte original saute automatiquement". Les élus Verts, Daniel Cohn-Bendit en tête, annoncent qu'ils vont demander un inversement des votes. La présidente de la séance, Diana Wallis, l'accepte. L'amendement est alors voté à 407 voix pour, 57 contre et 171 abstentions.

    Une victoire en demi-teinte ?

    Le député Guy Bono déclare, selon le journal Libération qui rapporte ses propos, qu'il s'agit "d'une nouvelle claque pour Sarkozy et le gouvernement français. [...] C'est un jour historique pour la démocratie. Le Parlement a montré qu'il pouvait faire valoir ses droits, et que ce n'était pas seulement de la diplomatie de couloir. " D'autres sont plus circonspects. Car le paquet télécom se retrouve pour le moment bloqué. Pour débloquer la situation, il faudrait que le Conseil des ministres accepte le paquet en bloc le 12 juin prochain. Faute de quoi tout repart en conciliation à l'automne, pour un nouveau marathon de négociations.

    Les contre-feux sont allumés

    Du côté du gouvernement et de la majorité parlementaire UMP, on sonne le tocsin et on allume les contre-feux. Dans un communiqué de presse, le ministère de la Culture affirme une nouvelle fois "que l'amendement Bono ne remet pas en cause le projet de loi Création & Internet". Et d'ajouter : "l'amendement se borne en effet à poser le principe selon lequel toute atteinte aux "droits et libertés fondamentaux" des internautes ne peut intervenir que sur le fondement d'une décision des autorités judiciaires. Or, l'accès à internet à son domicile ne s'est vu reconnaître le statut de "liberté fondamentale" à l'égal, par exemple, de la liberté de croyance, de la légalité des peines ou du droit de propriété, dans aucun pays du monde".

    Pour Jean-François Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, le refus du Parlement européen d'autoriser les coupures d'Internet sans décision de justice préalable "ne vaut pas" en France, tout en dénoncant dans la foulée les "petites manip' des socialistes français qui ont passé un coup de fil à leurs copains socialistes eurodéputés". Hasard du calendrier ou heureuse circonstance pour certains, l'Assemblée nationale a entériné hier soir le principe d'une "double peine" -coupure de ligne internet mais poursuite du paiement de l'abonnement- pour les internautes coupables de téléchargement illégal.

    Un ultime tour de piste ?

    Le projet de loi sur internet doit être voté le 12 mai à l'Assemblée nationale, avant de venir à nouveau devant le Sénat le 13 mai dès 9h30. Le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, Roger Karoutchi, a affirmé que le Sénat voterait le texte en une demi-journée mercredi, après son adoption à l'Assemblée. La guerre dans les travées de l'Assemblée Nationale, sans doute au Sénat et sur les bancs des instances européennes ne semble pas prête d'être finie...

    Olivier Pallaruelo avec Libération, Clubic, Yahoo et Degroupnews

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