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    Steve Buscemi & Sienna Miller en "Interview"

    Avec "Interview", le comédien américain Steve Buscemi s'essaye à la réalisation. Il nous dévoile son film, en compagnie de son actrice, Sienna Miller.

    AlloCiné : Comment ce film vous a trouvé Steve ? Ou alors est-ce vous qui l'avez trouvé ?

    Steve Buscemi : Et bien je connaissais le producteur Bruce Weiss depuis longtemps. Il m'a appelé un jour et m'a demandé de regarder trois films de Theo van Gogh. Theo souhaitait en faire des remakes américains, mais comme vous le savez il a été tué avant de pouvoir le faire, en 2004. J'ai alors rencontré le producteur de Theo, Gijs van de Westelaken et j'ai décidé de réaliser une nouvelle version de Interview, car j'étais vraiment intéressé par les relations entre ces deux personnages. C'est comme un match de boxe entre eux, entre ce journaliste politique et cette jeune actrice. C'était un défi fascinant en tant que comédien.

    Sienna Miller : Quant à moi, j'étais disponible et j'ai reçu un appel de mon agent me disant que Steve pensait à moi pour son film. J'ai accepté sans même lire le scénario. Et c'était vraiment agréable de découvrir après coup combien ce script était bon. Mon personnage est très complexe et fascinant, et c'était donc pour moi une très bonne expérience.

    Combien de temps a duré le tournage ?

    Steve Buscemi : Je suis assez long donc ça m'a pris neuf jours ! Alors que Theo a tourné le sien, je crois, en cinq jours. Nous avons fait venir l'équipe de Theo et son directeur photo pour tourner avec nous. Nous avons également engagé l'assistant de Theo. C'était donc une équipe internationale. Nous avons tourné avec trois caméras, comme Theo l'avait fait, car cela vous donne beaucoup plus de libertés pour faire de longues prises. Theo adorait les acteurs. Et c'est un processus créatif très stimulant pour les comédiens, qui peuvent faire de longues prises sans coupes ou sans changement de décors. En couvrant trois angles de caméra simultanément, vous avez toujours de bonnes surprises. Quand vous faites de si longues prises, vous finissez vraiment par oublier, en tant qu'acteur, que la caméra tourne.... Nous avons tourné ce film assez vite finalement, mais je ne me suis jamais senti sous pression. Et puis c'était très stimulant de jouer face à une actrice aussi talentueuse que Sienna.

    Quel était le principal challenge sur ce film ? De tourner avec seulement deux personnages ?

    Steve Buscemi : C'est assez intimidant au départ, car vous devez parvenir à captiver vos spectateurs et à les intéresser à ces personnages, assez en tout cas pour les suivre durant 90 minutes. D'un autre côté, c'était vraiment agréable pour nous de pouvoir nous concentrer sur ces deux personnages, et de prendre le temps de découvrir des choses et d'explorer différentes approches. Parfois, sur certains films, vous êtes si peu à l'écran que vous quittez le plateau en vous disant que vous auriez aimé avoir un peu plus de temps face à tel ou tel acteur. Mon but était de faire un film qui ait autant d'intégrité que l'original. Je ne voulais pas seulement faire une autre version. Je voulais que le public américain découvre le travail de Theo Van Gogh.

    Sienna Miller : Pour moi, le tournage a été tellement rapide que j'ai à peine réalisé que nous tournions un long métrage !

    Que pouvez-vous nous dire de votre personnage ? Comment était-ce de jouer Katia ?

    Sienna Miller : J'ai rencontré la véritable Katia, mais je n'ai pas voulu voir le film original avant que nous finissions de tourner le nôtre. Nous avons beaucoup modifié le personnage par rapport au film original. Elle est plus américaine, et plus psychotique également. C'était vraiment un plaisir de l'interpréter, et aussi une surprise quand la vraie Katia a débarqué un jour sur notre plateau alors que je ne savais pas qui elle était. C'était une expérience vraiment unique pour moi, très émouvante et très libératrice.

    Quelles sont les autres différences entre votre version et le film original ?

    Steve Buscemi : Nous avons changé de petites choses. Au début du film par exemple, dans la scène entre Pierre et son frère, qui se déroulait entre Pierre et son meilleur ami dans le film de Theo. Dans l'original, la petite fille est morte plus jeune. Le journal est différent également, dans notre version c'est un journal sur ordinateur. Mais je ne pense pas avoir modifié l'esprit du film ni les relations entre les personnages. C'est intéressant parce que ce film parle de la façon dont on peut blesser autrui. Et je pense que vous ne pouvez pas blesser quelqu'un auquel vous n'êtes pas attaché, ni être blessé par quelqu'un à qui vous n'êtes pas attaché. C'était intéressant de filmer deux acteurs se dévoilant et se révélant l'un à l'autre au cours de cette confrontation.

    Les relations humaines sont-elles les même ici, aux Etats-Unis, et ailleurs dans le monde ?

    Steve Buscemi : Les relations humaines sont universelles. Il existe des relations autodestructrices et abusives partout dans le monde. C'est quelque chose d'universel. Nous n'avons donc pas modifié l'esprit du film en en faisant une version américaine.

    Comment avez-vous abordé l'aspect "indiscrétions" sur le monde des stars et sur la politique et la Maison Blanche ?

    Steve Buscemi : Nous pouvons en parler, bien sûr, et je suis content que chacun voit dans ce film ce qu'il souhaite y voir, mais à mes yeux, il s'agissait surtout de traiter de la relation entre ces deux personnages, le chemin qui les amène face à face. Le but n'était pas de faire un film sur les stars ou sur le politique. D'ailleurs quand on aborde la question politique, je ne rentre pas dans les détails. Notamment parce qu'au moment du tournage, si on parlait beaucoup de cette affaire d'un politicien impliqué dans une relation avec une mineure, je savais qu'au moment de la sortie, on serait passé à autre chose. C'est donc toujours délicat d'aborder ces sujets. Je ne souhaitais pas non plus attaquer l'administration Bush, mais comme nous sommes en guerre et que nous vivons une époque difficile... Et j'espère d'ailleurs que les spectateurs s'arrêteront sur ce qui est dit dans le film, qu'il y a eu plus de journalistes tués en Irak que durant la guerre du Vietnam. Ca, je voulais m'assurer que ce soit dans le film.

    Sienna, vous serez prochainement à l'affiche de "Factory Girl", en muse d'Andy Warhol...

    Sienna Miller : Et bien, comme moi, elle croque la vie à pleine dents. J'ai parfois l'impression, comme elle, de rater certains moments de ma vie tellement tout va vite. Mais vous savez, je suis, je crois, un peu plus sérieuse qu'elle et je ne fais pas autant de folies qu'elle à l'époque de The Factory. C'était un personnage difficile à aborder, car elle est si fragile... D'ailleurs, c'était vraiment émouvant de présenter le film au festival de Santa Barbara : Edie Sedgwick était originaire de cette région, et elle est morte à Santa Barbara. C'était donc vraiment émouvant pour moi et pour l'équipe. J'ai vraiment essayé de lui rendre hommage dans ce film, j'ai passé un an à faire des recherches sur sa vie, et j'espère lui rendre justice dans ce Factory Girl...

    Que pouvez-vous nous dire de Guy Pearce en Andy Warhol ?

    Sienna Miller : Guy Pearce m'a beaucoup inspiré. Vous le verrez à l'écran, il est totalement devenu Andy. Il a une approche tellement profonde du personnage. A certains moments, nous avons vraiment eu l'impression de revenir en arrière, à l'époque de The Factory et de vivre dans cet environnement surréaliste. Guy est un acteur formidable, et il y a eu une vraie alchimie entre lui et moi. C'était essentiel car il fallait montrer la relation très forte qui unissait ces deux personnes. Nous avons vraiment ramené The Factory à la vie, sans en occulter le côté destructeur bien sûr. J'ai toujours été une fan d'Andy Warhol et j'espère que ce film plaira également à ses fans, et au-delà à tous ceux qui aiment l'art, les films... Mais ce film parle également du fait d'essayer d'être aimé pour qui on est. C'est un film très fort sur la vie en général, et sur la façon dont on doit se battre pour survivre.

    Propos recueillis à Sundance le 20 janvier 2007 par Emmanuel Itier

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