Crâne chauve, visage émacié, oeil perçant, Daniel Emilfork occupe une place de choix dans la galerie des "gueules" du cinéma français. L'acteur est décédé ce mardi 17 octobre, à l'âge de 82 ans.
Venu d'Ukraine
Issu d'une famille originaire d'Odessa (Ukraine) fuyant les pogroms, Daniel Emilfork, né Daniel Zapognikof, gagne la France dans les années 50. Formé à la comédie par Roger Blin et Tania Balachova, l'acteur impose d'emblée son physique inquiétant que renforce encore un accent venu de l'Est auquel il se plaît à donner les inflexions les plus lugubres. Au théâtre, il fait sensation dans le répertoire classique, jouant notamment Shakespeare, Lorca ou Tchekov dans le cadre de la compagnie Balachova. Remarqué par Marc Allégret, Emilfork débute au cinéma dans Futures Vedettes (1955), avec Jean Marais et Brigitte Bardot. Dès lors, l'acteur va s'imposer comme l'un des seconds rôles incontournables du cinéma français.
Malaise et ambiguïté
Drame historique (Notre-Dame-de-Paris, Le Triomphe de Michel Strogoff), espionnage (OSS 117 se déchaîne), film noir (Les Espions) ou horreur (Midi minuit), Emilfork explore tous les genres et tous les supports, composant de savoureux personnages pour le grand comme pour le petit écran. Mais quelque soit le rôle, il crée l'effroi ou suggère le malaise et l'ambiguïté avec un sens aigu de la nuance. "Gueule" du cinéma hexagonal, le comédien ne néglige pour autant l'international, et joue sous la direction de Clive Donner (Quoi de neuf, Pussycat ?), Peter Ustinov (Lady L.), George Cukor (Voyages avec ma tante) et surtout Federico Fellini (Casanova). Actif sur les plateaux de cinéma, l'acteur l'est aussi sur les planches, participant aux mises en scène de Patrice Chéreau et Claude Régy. En 1986, il marque les esprits dans Marat-Sade de Peter Weiss.
Savant fou pour Caro et Jeunet
Quelque peu ignoré par la nouvelle génération des cinéastes français, Daniel Emilfork connaît un retour grâce avec Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro, qui lui confient en 1994 le rôle du scientifique voleur de rêves d'enfants dans La Cité des Enfants Perdus.
Vincent Garnier avec AFP
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