Un grand du cinéma français s'est éteint. Le comédien Jacques François, célèbre second rôle des productions hexagonales, s'est éteint ce 25 novembre. Il avait 83 ans.
De la Marine au théâtre
Fils d'un avocat français et d'une Américaine, Jacques François reçoit une éducation bourgeoise, dont il gardera toute sa vie durant rigidité et retenue. En 1939, il s'engage dans la Marine française. Démobilisé, il reprend ses études mais les délaisse rapidement pour se consacrer au théâtre. Elève de Charles Dullin, René Simon, Marcel Herrand et Raymond Rouleau, il débute sur les planches aux côtés d'Elvire Popesco en 1941 dans La Ligne d'horizon de Serge Roux.
En 1942, Jacques François fait ses premiers pas au cinéma sous la direction de Jean Dréville dans Les Affaires sont les affaires. Remarqué par les producteurs de la Metro Goldwyn Mayer, le comédien, parfaitement bilingue, s'envole pour Hollywood. Dès son premier film américain, il figure au générique d'Entrons dans la danse, une comédie musicale de Charles Walters avec Fred Astaire et Ginger Rogers. L'expérience américaine se révèle rapidement une parenthèse. Déçu, Jacques François rentre en France. Il se produit dans des films de Jacques Becker (Edouard et Caroline), René Clair (Les Grandes Manoeuvres) ou Sacha Guitry (Si Versailles m'etait conté...). Sa distinction et son maintien le prédestinent aux rôles d'aristocrates, d'officiers ou de grands bourgeois.
Une si longue absence
A la fin des années cinquante, les jeunes réalisateurs de la Nouvelle Vague délaissent l'acteur. S'ensuit une éclipse d'une quinzaine d'années des plateaux de cinéma, une période qu'il met à profit pour revenir au théâtre, se produisant notamment dans des pièces de Graham Greene, Félicien Marceau, Jean Anouilh ou Francoise Sagan. Il mène également une brillante carrière à la télévision.
Retour en force
En 1970, il revient au premier plan dans Clair de Terre, enchaîne sur L'Attentat, le film choc d'Yves Boisset sur l'enlèvement de Ben Barka, et apparaît en 1973 dans Chacal de Fred Zinnemann. Cette même année 73, il participe à l'acide Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil de Jean Yanne, où sa composition de PDG laisse entrevoir ses talents dans le registre comique. Le réalisateur-comédien fait à nouveau appel à lui pour Les Chinois à Paris ou encore Je te tiens, tu me tiens par la barbichette. Dès lors, Jacques François trouve son emploi, celui du notable, froid et distant, capable de garder son sérieux dans les situations les plus loufoques. Le comédien prête ainsi sa stature distinguée et sa calvitie aristocratique à des rôles d'hommes de pouvoir. Il est tour à tour rédacteur en chef despotique dans Le Jouet, préfet dans La Zizanie, général dans Les Aventures de Rabbi Jacob ou encore colonel dans Le Gendarme et les extraterrestres.
Une popularité décuplée
Second rôle réclamé dans les comédies les plus populaires, Jacques François voit sa popularité décupler au début des années 1980 au contact d'une nouvelle vague comique française. La troupe du Splendid lui confie le rôle du pharmacien dans Le Père Noël est une ordure de Jean-Marie Poiré, qu'il retrouve successivement pour Papy fait de la résistance (1983), Twist again à Moscou (1986), Mes meilleurs copains (1989), Operation Corned-beef (1991), et Les Couloirs du temps, les visiteurs 2. La décennie 1980 marque également ses retrouvailles avec Jean Yanne (Liberté, égalité, choucroute ) et ses collaborations avec Georges Lautner (La Vie dissolue de Gérard Floque, Triplex).
Plus discret dans les années 1990, il apparaît encore dans Mon homme et Les Acteurs de Bertrand Blier, Le Roi danse de Gérard Corbiau et Fifi Martingale, son dernier rôle.
Vincent Garnier